En juin, 500 000 élèves de seconde terminent leur année scolaire par un stage d’observation de deux semaines en entreprise. Mais après plusieurs accidents mortels survenus cette année, les syndicats haussent le ton et réclament la suppression de ce dispositif, qu’ils jugent inégalitaire et peu utile.
Les stages en entreprise pour les élèves de seconde sont de plus en plus remis en question. La colère a atteint son paroxysme après la mort d’un adolescent dans la Manche, mercredi 18 juin. Le jeune de 16 ans a été tué par la chute d’une palette dans un magasin de décoration et d’ameublement. Une enquête a été ouverte pour homicide involontaire.
Cet accident s’ajoute à la mort récente d’un apprenti maçon de 15 ans, percuté par un engin de chantier à Nice début avril, ainsi qu’à celle d’un lycéen de 17 ans, décédé à cause d’une poutre métallique à Lyon. Ces drames ont suscité une vive réaction de la part de nombreux syndicats, qui réclament la fin des stages en entreprise pour les élèves.« Les jeunes ne sont pas assez formés ni suivis. Ils n’ont pas la culture de l’entreprise et ne sont pas préparés à la rudesse du milieu », souffle Abdallah Amghar, co-secrétaire de la CGT Éduc’action 31.
Depuis la rentrée 2023, les élèves de seconde doivent obligatoirement effectuer un stage d’observation de deux semaines en juin. Concrètement, cela signifie que les entreprises doivent pouvoir accueillir plus de 500 000 stagiaires au début de l’été — une recherche souvent difficile pour de nombreux élèves, contraints de se contenter d’un « plan B ».
La secrétaire générale du Snes-FSU, Sophie Vénétitay, déclarait sur France Inter vendredi 20 juin : « On était vraiment dans une opération de communication avec ces stages. Il s’agissait d’afficher le fait que les élèves étaient occupés pendant que d’autres passaient des examens. Nous demandons que les stages de seconde n’aient plus lieu. »
Même son de cloche pour la CGT Éduc’Action, qui demande dans un communiqué « la suppression des stages en entreprises dès la troisième, des séquences d’observation en seconde qui ne représentent pas d’intérêt et l’interdiction de l’apprentissage avant 18 ans. » Pour rappel, tous les élèves de troisième doivent effectuer depuis 2006 un stage d’une semaine afin de découvrir le monde professionnel.
En 2023, 33 jeunes de moins de 25 ans sont morts sur leur lieu de travail, selon le ministère du Travail. Interrogé par l’AFP, celui-ci a réagi à la série de drames récents : « Ces accidents créent une émotion légitime. Il n’est pas acceptable que des jeunes qui commencent leur vie professionnelle trouvent la mort sur leur lieu de travail. C’est la raison pour laquelle la ministre Astrid Panosyan-Bouvet a demandé d’instruire un renforcement des mesures destinées à prévenir ces accidents graves et mortels qui seront présentés aux partenaires sociaux ».
Au-delà des décès, le co-secrétaire de la CGT 31 dénonce également un risque de violences sexistes et sexuelles (VSS), notamment dans les instituts esthétiques et les EHPAD.
S’ils peuvent enrichir un CV ou déclencher des vocations, ces stages restent « très inégalitaires », selon Pierre Priouret, secrétaire général du SNES-FSU de l’académie de Toulouse. « C’est bien quand papa maman ont des relations bien placées pour avoir de bons stages mais pour beaucoup d’élèves c’est très difficile d’en trouver. On parle d’un tri social. Nous n’avons jamais été favorables à ces périodes d’intervention. Ce n’est pas préparé, rien n’est exploité pédagogiquement derrière. »
Les syndicats dénoncent également une valorisation excessive de l’entreprise.« Ce n’est pas un lieu de formation. Ce sont les enseignants qui doivent aider et apprendre. On jette les jeunes dans le milieu professionnel où les conditions d’accueil ne sont pas acceptables avec des tuteurs au suivi insuffisant », critique Adballah Amghar, professeur en lycée professionnel depuis plus de 30 ans.
Il plaide pour une alternative : proposer aux élèves de seconde des activités sportives ou culturelles, auxquelles ils pourraient s’inscrire selon leurs envies.
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