La triche au baccalauréat semble s’être trouvée un nom : les intelligences artificielles comme ChatGPT qui tient la dragée haute chez les lycéens. Certains d’entre eux confient se servir régulièrement de l’IA pour des devoirs à la maison, en classe, voire lors d’examens comme le baccalauréat dont 40 % de la note est en contrôle continu.
Cela peut paraître pour le moins extravagant, mais certains lycéens candidats au baccalauréat, qui s’est déroulé cette année du 16 au 19 juin pour les séries générales et technologiques, avouent avoir « triché » lors d’un contrôle continu, soit 40 % de la note de l’examen de passage avant les études supérieures. Rien de plus simple avec l’intelligence artificielle, notamment ChatGPT utilisé par les lycéens, dès la troisième et la seconde au lycée.
« La triche s’est grandement simplifiée »
Paul et Léon (leurs prénoms ont été modifiés), deux jeunes lycéens toulousains, témoignent de cette évolution des méthodes d’une tricherie qui s’est généralisée dans de nombreuses matières. « La triche s’est grandement simplifiée grâce aux IA comme ChatGPT, explique Léon. Il suffit maintenant de prendre une photo avec son téléphone du sujet quand le prof donne les consignes, puis de demander à l’IA de faire le devoir à notre place ». Frauder lors du baccalauréat, Léon n’y pense même pas en sachant « que d’autres le font ». « J’ai peur de tricher suite aux répercussions que cela peut engendrer », poursuit Léon.
Pas de quoi fanfaronner car en cas de fraude, la note est sévère : une peine de prison et une amende pour faux et usage de faux, et des sanctions administratives, notamment l’interdiction de passer le bac pendant une durée maximum de 5 ans. « La même réglementation est applicable aux épreuves orales », précise l’académie de Toulouse qui ne signale aucun incident pour l’heure. Le ministère de l’Éducation nationale a signalé une augmentation de 14 % des cas de triche lors du baccalauréat depuis 2023.
« Parfois, les professeurs se doutent de la supercherie »
Paul est plutôt du genre à assumer. « Moi je l’avoue, dit-il, je triche plutôt souvent. C’est super simple, je peux utiliser des applis qui m’expliquent ce que je dois écrire et je peux même leur demander d’écrire comme un élève de mon âge. Parfois, les professeurs se doutent de la supercherie et récupèrent les téléphones avant les évaluations, c’est pourquoi j’en ai toujours deux en ma possession ». Deux téléphones, voire trois, entend-on du côté des enseignants qui bataillent de plus en plus contre l’utilisation de l’IA. Et ce n’est que le début.
« En mathématiques, il est difficile de détecter l’IA »
« Dans ma matière, c’est très difficile de détecter un devoir fait avec l’intelligence artificielle, surtout s’il y a des calculs, les IA sont extrêmement intelligentes, reconnaît Pierre Priouret, professeur de mathématiques à Toulouse et secrétaire académique du Snes-FSU. On peut parfois détecter une réponse qui a l’air intelligente, mais qui ne tient pas la route, avec des erreurs dans l’argumentation, voire sans argumentation. » Dans tous les cas de figure, rappelle l’enseignant, « le problème est la preuve formelle, y compris de la part de la famille, si l’élève n’avoue pas. Des matières sont plus exposées que d’autres, il y a encore des possibilités de détection, mais cela ne durera pas. »
Des détecteurs qui captent les ondes magnétiques au lycée ?
Pour contourner l’accès du téléphone au lycée pour le baccalauréat 2025, les moyens manquent mais l’académie d’Aix-Marseille a autorisé les « détecteurs qui permettent de capter les ondes électromagnétiques des téléphones portables ». Un syndicat enseignant juge la mesure illégale.
« La question est posée, ajoute Pierre Priouret. Soit, on se dirige vers une absence de devoirs à la maison. Si déjà certains élèves arrivent à tricher lors d’un examen, c’est encore moins difficile en dehors de l’établissement. Au baccalauréat, les téléphones sont pourtant déposés, on accompagne les élèves lorsqu’ils vont aux toilettes, mais malgré ça… » Mais le vrai sujet de fond est les apprentissages, reconnaît le professeur de mathématiques : « Car ce faisant, les élèves n’apprennent pas grand-chose en termes de connaissances, mais surtout en termes de structuration de la pensée, ils sont potentiellement dépendants de la machine ».