Le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, est l’invité d’ICI Occitanie au lendemain de sa conférence de presse sur l’habitat dégradé, et au surlendemain de ces menaces de mort proférées sur les murs du Capitole en marge d’une manifestation en soutien à Gaza.
Le maire de Toulouse est la cible de certains militants pro-Palestine depuis plusieurs mois, avec dernièrement des menaces de mort taguées sur le Capitole. Jean-Luc Moudenc, qui par ailleurs vient de faire des annonces en matières d’habitat dégradé, est l’invité de la matinale d’ICI Occitanie.
ICI Occitanie – Un nouveau bâtiment va être reconstruit au 4, rue Saint-Rome où l’immeuble s’est effondré le 9 mars 2024 . Quand ?
Jean-Luc Moudenc : Ça dépend des propriétaires. Les propriétaires ont réfléchi pendant des mois et des mois, nous avons dialogué avec eux, et il y a peu de temps, ils nous ont indiqué leur volonté de reconstruire. Donc maintenant, il faut qu’ils choisissent un architecte, qu’ils définissent un projet, qu’ils viennent nous le présenter de manière à ce qu’on puisse l’instruire dans nos services au titre des autorisations d’urbanisme que nous serons amenés à délivrer.
Ce n’est pas moi qui décide, c’est une propriété privée. On peut penser que dans les deux ans qui viennent, si jamais ils ne perdent pas de temps, on aura cette reconstruction.
Que disent les rapports d’expertise ? Qu’est-ce qui a provoqué l’effondrement et qui en est responsable ?
Je ne suis pas destinataire de ce rapport d’expertise. Donc je ne peux pas répondre à votre question, mais vous pouvez la poser aux copropriétaires.
Juste derrière les ruines de la rue Saint-Rome, il y a le numéro 1 de la rue des Puis-clos qui a été sauvé in extremis et qui est recouvert d’étais depuis un an. Les copropriétaires ne se sont toujours pas prononcés. C’est un problème pour l’image de la ville tout de même, ce bâtiment rempli de morceaux de bois ?
C’est une image certes peu flatteuse, mais qui montre que les choses sont tenues, sont suivies, et qu’on a évité un drame. Ces étaiements, ils ont été réalisés par la collectivité, puisqu’il y avait défaillance du syndic mandaté par cette copropriété. Ils ont réfléchi, il semble qu’ils ne s’estiment pas capables de reconstruire ou de réhabiliter. Nous avons indiqué aux copropriétaires qu’on était prêts à acheter soit totalement, soit partiellement cet immeuble. pas au prix du marché, parce qu’on est déjà beaucoup intervenus dans cet endroit, mais au prix que fixera l’État. Donc il appartient maintenant aux copropriétaires de réfléchir et de nous dire quelle est leur position.
Si jamais on l’achète, je veux savoir si on peut le réhabiliter. L’immeuble est extrêmement fragilisé. À partir du moment où on deviendrait propriétaire ou copropriétaire, on aurait accès à des informations qui, pour le moment, ne sont pas à notre possession. Moi, je crains une facture extrêmement salée.
Cela fait plus d’un an que l’immeuble s’est effondré, et on a encore très régulièrement des évacuations d’urgence dans l’hypercentre toulousain. Pouvez-vous nous garantir que tous les risques d’effondrement sont écartés à Toulouse ?
Le garantir, non, parce que ça dépend d’une situation qui se situe toujours dans une copropriété privée. C’est bien ça qu’il faut avoir en tête. Et donc la vigilance, elle est d’abord au niveau des copropriétaires ou des propriétaires et au niveau des locataires. C’est également là que se situent les responsabilités. Nous, on intervient dès qu’on a un signalement. Jusqu’ici, les choses ont très bien fonctionné. Il y a d’autres villes, vous le savez, où il y a eu des drames, des morts, des blessés. Il n’y a pas eu un seul blessé à Toulouse. Ce que je souhaite, moi, c’est que l’on soit maintenant proactif et que, sans attendre un signalement, on puisse proposer aux propriétaires d’immeubles qui sont repérés comme fragilisés de se lancer dans un projet de rénovation. On a fait un recensement depuis plusieurs mois
150 copropriétés sont considérées fragiles et donc nous allons maintenant proposer aux copropriétaires de définir un plan de rénovation sans attendre qu’il y ait des problèmes.
D’ici l’été, la loi de lutte contre l’habitat dégradé va entrer en vigueur. Qu’est-ce que ça va changer très concrètement pour vous en tant que maire ?
Il y a un nouveau décret qui donne un droit d’expropriation à la mairie lorsque un immeuble est laissé sans rien faire, alors qu’il faut intervenir et que les propriétaires ne sont manifestement pas au rendez-vous. Et donc la collectivité a désormais le droit de se rendre propriétaire de l’immeuble, à condition que cet immeuble soit remédiable, c’est-à-dire qu’on puisse le réparer ou le reconvertir.
Et vous allez expérimenter le permis de louer pour lutter contre le mal logement et l’habitat indigne dès le mois de septembre prochain. Quel quartier va être concerné ?
On a considéré que le quartier de Arnaud-Bernard présentait des fragilités plus qu’ailleurs. Donc, on va expérimenter le permis de louer à cet endroit-là. On verra comment ça marche, et puis si ça marche bien, si le process est fluide, on pourra l’étendre.
J’aimerais vous entendre aussi sur la manifestation propalestinienne qui a eu lieu lundi soir à Toulouse et qui a dégénéré. La façade du Capitole a été taguée et des menaces de mort à votre encontre ont été écrites sur les murs. C’est dur de subir ça quand on est maire ?
C’est dur, mais je dirais que pour être franc, ça ne me surprend pas beaucoup. Aujourd’hui, on vit des temps de violence. Il y a deux ans, je me suis fait agresser avec un certain nombre de collègues à la fête de la musique. Il y a une montée de la violence dans notre société, une montée des extrêmes. Et ce qui est important, c’est que les gens comme moi, qui sont dans un esprit démocratique, républicain, classique, qu’on ne soit pas peureux, qu’on ne recule pas, qu’on ne cède pas. Et c’est la raison pour laquelle hier j’ai déposé plainte contre la personne qui a écrit ces « gentilles » inscriptions.
La responsable du collectif Solidarité Palestine-Toulouse ne revendique pas du tout ces tags, mais vous demande de suspendre le jumelage de la ville avec Tel-Aviv. Que lui répondez-vous ?
Je lui réponds non, parce que ça veut dire qu’elle n’a pas compris ce qu’est un jumelage. Un jumelage, ce n’est pas un lien entre une ville et un gouvernement dont on approuverait la politique. Non, ce jumelage, il existe depuis plus de 60 ans, il n’est pas lié au gouvernement Netanyahou, dont je désapprouve beaucoup d’initiatives, et même le sens de la composition de ce gouvernement. Mais un jumelage, c’est un lien entre les peuples. Et les peuples, effectivement, ils durent alors que les gouvernements ne durent pas. Donc je ne veux pas mettre fin à l’amitié entre le peuple de Tel-Aviv et le peuple de Toulouse. On a aussi une coopération avec Ramallah, et ce n’est pas parce qu’il y a eu les attentats du Hamas que je me suis posé la question de savoir si on remettait en cause cette coopération.
https://www.francebleu.fr/occitanie/haute-garonne-31/toulouse-31555