À Tournefeuille, une altercation banale sur la route a viré à l’agression. Une retraitée de 74 ans aspergée de gaz lacrymogène, son petit-fils traîné sur plusieurs mètres… Le tribunal a condamné l’agresseuse à cinq mois de prison avec sursis.
Chaque pas de Liliane vers la barre semble rallonger le temps. Cette petite femme de 74 ans, au visage rond encadré par sa coupe carrée à la coloration fatiguée, parle clairement, au ralenti. À son âge, elle ne se précipite plus. Le lundi 3 juin, à Tournefeuille, cette retraitée a été agressée pour sa lenteur. Au volant de sa voiture, elle faisait presque du surplace.
Il était un peu plus de 8 heures. Liliane cherchait le cabinet médical où Samuel, son petit-fils de 21 ans, avait rendez-vous. Bouchra, la prévenue, était juste derrière. Sa fille allait être en retard au collège. Cette trentenaire a klaxonné. Elle lui a coupé la route dès qu’une ouverture s’est présentée. Elle n’est pas repartie. Liliane est sortie de son véhicule. Arrivée à hauteur de Bouchra, la septuagénaire est aspergée d’un spray orange, sorti de l’habitacle. Deux fois. La bombe lacrymogène lui a fait perdre tout repère spatio-temporel. « C’est la première fois que j’en fais usage. Je l’ai achetée il y a quatre ans. En voyant sa tête [de Liliane, NDLR], j’ai pris peur. Elle m’a traitée de bougnoule », raconte Bouchra, nerveuse. La retraitée lui répond, consternée : « Je suis allée deux fois en Algérie. Je ne vois pas pourquoi je l’insulterais… »
« On vous ment… »
Samuel, aussi grand que son air paraît candide, a voulu aider sa grand-mère. Il a fait le tour pour se présenter côté passager. La jeune femme a accéléré. Son bras était à l’intérieur de la voiture. Son corps a été traîné sur plusieurs mètres. Il a reçu quatre jours d’incapacité de travail. Me Nelly Magendie, avocate des victimes, considère que la culpabilité de Bouchra « ne fait aucun doute ».
« Mon client [Samuel] n’est pas sorti de tout l’été. Il était terrorisé à l’idée d’être agressé de nouveau », fait-elle savoir. Pour la procureure de la République, la prévenue n’était pas dans une situation de danger, « elle savait qu’elle n’allait pas être attaquée ». Elle requiert huit mois de sursis.
Un peu exagéré, pense Me Cécile Brandely, conseil de Bouchra. La défenseuse rappelle qu’aucun témoin de la scène n’a été retrouvé, que les images de vidéosurveillance n’ont rien donné. « On vous ment de l’autre côté de la barre », dénonce-t-elle avant de méthodiquement pointer les failles dans la version des parties civiles. Sa cliente esquisse un sourire, satisfaite de la plaidoirie de son avocate. Liliane, dit la présidente, ne peut représenter un danger pour personne. Le tribunal considère que ce dossier n’est pas un cas de légitime défense et déclare coupable Bouchra à cinq mois de prison avec sursis et à verser 1500 euros aux victimes au titre du préjudice moral. La trentenaire va faire appel.