Le street-art investit à nouveau les 3500 m² de hangars, dans le quartier Saint-Michel, à Toulouse, pour une 5e édition de Layup. Avec 46 artistes, l’exposition mêle graff, photo et installations dans un lieu voué à disparaître.
Ils ne pensaient pas pouvoir remettre le couvert mais les organisateurs de Layup ont eu une bonne surprise en apprenant que la démolition des anciens locaux d’Orange, boulevard Delacourtie, était reportée. Une nouvelle édition de cette exposition géante de street-art a donc été rendue possible, elle s’ouvre ce mardi et jusqu’au 13 juillet dans ces hangars de 3500 m². Un chapitre particulièrement ambitieux, avec 46 artistes, aux modes d’expression très différents, et une exposition dans l’exposition, baptisée « Fond blanc ». Nous avons visité le site en avant-première.
À l’entrée, le graffeur FENX peint une grande fresque bleue, « paysage fantasmé » d’un désert des États-Unis, en collaboration avec RERO. « C’est une allégorie du rêve américain et de la société de consommation, confie l’artiste. Ça m’a beaucoup fait rêver quand j’étais gamin. » Plus loin, au milieu de l’espace central, un vieux bus trône, surplombé d’un énorme ballon aux « lettres bubble ». Il servira de cabine DJ à Rams et ses invités, les vendredis et samedis. Rams, c’est le « blaze » de Stéphane Ramos, l’un des trois associés de l’association Layup. Dans le hangar attenant, ce musicien a créé une pièce très divertissante, la « Fluo box ». Une salle plongée dans le noir, aux inscriptions fluos qui évoquent des titres de chansons, avec musique et boule à facettes.

Photo, mapping, toiles d’artistes, fresques monumentales… Le panel est vaste. « L’esprit Layup, c’est surtout une bande de potes, passionnés d’arts graphiques et de graffiti. C’est gratuit, on aime accueillir tous les publics pour qu’ils en prennent plein les yeux. Notre ADN, c’est de faire plaisir », ajoute le co-organisateur de l’événement.
Le pinceau de Mambo
Les bras croisés, Mambo contemple deux immenses pans de mur, qu’il a recouvert de son fameux geste de « pinceau qui dégouline ». Flavien Demarigny, de son vrai nom, expose pour la première fois à Toulouse. C’est à lui qu’on doit toutes les pochettes d’albums du DJ Guts depuis quinze ans, et celle du dernier opus de Laurent Garnier. « Je poursuis ma série ‘The strokes », c’est une réponse conceptuelle à tout ce que j’aime dans l’art moderne, explique-t-il. À Layup, j’aime bien ce non-clivage entre l’art contemporain et l’art urbain. Ça cohabite bien. »

En continuant la découverte, on croise une immense danse hip-hop signée Difuz, une abstraction en relief du Berlinois Skenar, une installation bleu nuit psyché de Matthieu Dagorn. Ce portrait géant, en plaques de polypropylène alvéolaire assemblées avec du cerflex, a été conçu par David Mesguich. « Je travaille beaucoup en milieu carcéral, j’aime intégrer le social dans mon œuvre », explique son auteur.
Le Montpelliérain Maye, un ami de la bande, habitué des lieux, prépare une fresque. Il a également rapporté des toiles de l’Urban Art Fair, à Paris, où il exposait récemment. » Dans dix ans, les Toulousains se rendront compte à quel point ils ont eu de la chance, il se passe tellement d’événements graff ici, c’est fou. »
Côté galerie, des pièces plus petites, se prêtent à des immersions, dans la calligraphie de Zepha ou les tableaux en Lego de Lenz par exemple. Landry a recouvert une pièce du sol au plafond avec ses photos. Des portraits, des scènes capturées lors de voyages… « C’est un peu mon monde ! Une sélection aléatoire, sur une période de ma vie. C’est la première fois que je fais ça. »

« Fond blanc », l’expo dans l’expo
Installée à l’écart, l’exposition d’art contemporain « Fond blanc » égrène les œuvres de 13 artistes. Treize points de vue ultra-originaux. Une toile géante de Tilt, les créations insolites en blocs d’escalade de Bozar et celles en barrières de chantier de Lars Deux. Les photos de Mickael Zermati et François Boutaud, des images fantomatiques qui nous confrontent au gris. Ou encore les installations de Léa Rivera Hadjes, qui reproduit des sensations enregistrées lors de ses trajets en RER, ou les étranges objets de Léa de Cacqueray, qui mêlent rituels anciens et innovations techniques.
Comme à chaque fois, Layup se prêtera à des ateliers graffitis, des visites guidées et d’autres animations : séance de dédicaces, dégustation de bières, défilé de mode.