Le maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc se félicite de la suppression des zones à faibles émissions (ZFE) approuvée ce mercredi à l’Assemblée nationale. Le résultat, selon lui, « d’une loi mal faite dès le départ ».
La suppression des Zones à Faibles Émissions (ZFE) a été votée hier soir à l’Assemblée. Pour beaucoup, c’était une décision attendue. Était-elle, selon vous, courue d’avance ? Pourquoi ?
Je ne suis pas surpris. Cette suppression est le résultat d’une loi mal faite dès le départ, partie d’une intention louable – améliorer la qualité de l’air pour la santé – mais bourrée de contraintes ignorant la vie réelle des gens et conçue au détriment des plus modestes.
Le dispositif ZFE a été très critiqué, notamment pour sa complexité et son injustice sociale. Était-il mal conçu dès le départ ? Ou mal mis en œuvre ?
L’État a procédé d’une drôle de façon. Il a réuni une « convention citoyenne », pour répondre à la mode du moment, et s’est déchargé sur elle de ce sujet pourtant très complexe à traiter. Il en est sorti l’idée de ZFE, adoptée par le gouvernement d’alors puis le parlement. Cette loi a été élaborée sans impliquer les élus locaux que nous sommes… Tout en les chargeant de mettre en œuvre ces ZFE ! Comme méthode, c’est difficile de faire pire !
À l’époque, j’avais été un des premiers maires de grande ville et président de métropole à protester. J’avais fédéré au niveau national mes collègues de tous bords et m’étais battu avec eux pour la révision des modalités de cette loi et faire prévaloir une approche plus sociale. Mon idée était de ne pas obliger les gens à changer tout de suite leur véhicule, tout simplement parce que beaucoup n’en ont pas les moyens.
Si l’on veut concilier impératifs environnementaux et acceptabilité sociale, que faudrait-il mettre en place à la place ou en complément des ZFE ?
La première règle de bon sens, si on veut interdire la circulation d’un véhicule trop polluant, serait de mesurer la pollution réelle qu’il émet, par un contrôle technique individuel approprié. Or, la loi des ZFE ne retient que le critère de l’ancienneté pour interdire ou autoriser un véhicule à rouler. En réalité, il y a des véhicules plus récents qui roulent beaucoup et polluent davantage mais que la ZFE autorise à rouler. Et des véhicules plus anciens, bien entretenus par des automobilistes qui roulent peu, mais qui sont interdits de circulation par la ZFE. C’est absurde.
L’État, puisque c’est lui qui a créé les ZFE, devrait soutenir financièrement les personnes modestes et des classes moyennes pour s’acheter un véhicule propre. Sans les obliger à acheter un véhicule électrique qui coûte trop cher pour eux. Or, l’État ne le fait pas.
Le vote transpartisan qui a conduit à la suppression des ZFE montre une convergence politique inédite contre ce dispositif, y compris chez certains macronistes. Est-ce, selon vous, le signe d’un rejet profond du dispositif ?
Ce vote transpartisan, dans une Assemblée nationale pagailleuse et dramatiquement privée de majorité claire, montre surtout que c’est toujours très facile de se coaliser pour dire non à quelque chose plutôt que de choisir autre chose ! Aujourd’hui, mon inquiétude m’amène à poser une question à cette coalition négative de circonstance : que proposez-vous pour améliorer la qualité de l’air qu’on respire, puisqu’au lieu de réformer le dispositif les ZFE vous avez tout supprimé ? Pour le moment, ils ne proposent rien !
La ministre de la Transition écologique a rappelé que les ZFE ont contribué à réduire les décès prématurés liés à la pollution de l’air. En tant que maire, comment concilier cette urgence sanitaire avec la nécessité de préserver la cohésion sociale locale ?
Effectivement, il est impensable et totalement irresponsable de ne rien faire pour éviter les 45 000 décès annuels causés par la pollution de l’air, en ville notamment ! Car ce n’est pas une question d’écologie contrairement à ce que certains disent, c’est une question de santé. Il faut sans cesse le rappeler. ZFE ou pas, ma ligne de conduite, depuis 2014, consiste à inciter plutôt qu’à interdire. À développer les moyens de locomotion non polluants.