Peut-on soigner le myélome multiple avec moins de chimiothérapie ? Une étude, menée avec des patients de l’Oncopole de Toulouse, le suggère. Les résultats, présentés lors du congrès international de cancérologie ASCO 2025, marquent un tournant dans la prise en charge de ce cancer du sang, deuxième le plus fréquent.
Ce pourrait être un tournant considérable dans la prise en charge du myélome multiple. Une étude, menée en partie à l’Oncopole de Toulouse, pose pour la première fois la question de l’utilité de la chimiothérapie intensive avec autogreffe : doit-elle être maintenue chez les personnes de moins de 66 ans qui répondent bien au traitement donné en première ligne ? Les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique New England Journal of Medicine et ont été présentés au congrès international de cancérologie (ASCO) à Chicago. Ils pourraient s’imposer comme une nouvelle référence dans la prise en charge des patients.

Le myélome multiple est un cancer de la moelle osseuse qui touche, chaque année, plus de 5000 nouveaux patients en France, avec un pic d’incidence autour de 72 ans. Au cours des quinze dernières années, la survie des patients porteurs de ce cancer du sang a plus que doublé, notamment grâce à l’association de chimiothérapies intensives et d’autogreffes, un protocole largement développé par le Pr Michel Attal, ancien chef du service d’hématologie du CHU de Toulouse et ancien directeur général de l’IUCT-Oncopole.
« Aujourd’hui, la stratégie thérapeutique pour les patients jeunes, de moins de 66 ans, démarre avec l’administration de quatre médicaments (quadruplet) pendant six mois. Elle est ensuite suivie d’une chimiothérapie intensive avec une autogreffe de cellules souches, voire deux, puis d’un traitement de maintien. Mais, depuis 15 ans, de nouvelles molécules sont arrivées formant ce quadruplet, notamment en immunothérapie, et elles semblent très efficaces. Nous nous sommes donc interrogés sur l’intérêt de maintenir la deuxième phase (chimiothérapie et autogreffe) lorsque le patient répond très bien à la première, c’est-à-dire quand la maladie résiduelle est dite négative (les cellules malades ne sont plus détectables) », pose le Pr Aurore Perrot, hématologue du CHU de Toulouse à l’IUCT-Oncopole, qui a coordonné l’essai MIDAS (MInimal residual Disease Adapted Strategy) avec le Pr Cyrille Touzeau (CHU de Nantes).
L’étude a inclus 791 patients dans 70 centres en Belgique et en France, avec l’IUCT-Oncopole en premier centre recruteur (Près de 10 % des malades). Elle montre que chez les patients qui ont bien répondu au traitement quadruplet, il n’y a pas de différence en termes de maladie résiduelle négative entre ceux qui ont ensuite reçu une autogreffe et ceux qui ont poursuivi le même traitement mais sans autogreffe. Chez les patients moins bons répondeurs (chez eux, la maladie résiduelle est encore détectable), une seule autogreffe semble aussi efficace que deux autogreffes, voire un peu plus : la maladie résiduelle est négative chez 40 % des patients ayant reçu une seule autogreffe contre 32 % chez ceux qui en ont reçu deux.
« Une seule greffe au lieu de deux, ce n’est pas rien pour la qualité de vie des patients »
« Nous sommes confiants pour dire que la double greffe n’apporte rien de plus et qu’une seule greffe peut suffire pour une survie sans progression de la maladie estimée à environ 15 ans. Et ce n’est pas rien pour la qualité de vie des patients car les chimiothérapies utilisées en combinaison de la greffe sont très agressives. Mais nous restons prudents avant de dire qu’il n’est plus utile de faire d’autogreffe, nous n’avons pas assez de recul pour faire arrêter la chimiothérapie à tous les patients bons répondeurs. Nous aurons d’autres éléments pour répondre à cette question d’ici trois à cinq ans. Peut-être qu’il s’agira d’abord de différer le moment où on proposera l’autogreffe aux patients qui ont déjà bien répondu au traitement de première intention ou d’adapter l’intensité du traitement à chaque profil », conclut le Pr Aurore Perrot.