Après l’effondrement dramatique survenu en mars 2024 rue Saint-Rome, la Métropole veut accélérer la rénovation de l’habitat ancien. Deux nouveaux dispositifs vont être déployés dans les secteurs les plus fragiles.
« Depuis l’effondrement, les regards ont changé », reconnaît un agent municipal, posté hier dans les ruelles du centre-ville. Derrière lui, le trou béant du 4 rue Saint-Rome et les façades fragiles du 1 rue des Puis-Clos rappellent que le cœur historique de Toulouse n’est pas épargné par la vétusté.

Au 1 et 3 rue des Puits Clos, les volets sont clos, l’immeuble en péril. Ici, la mairie envisage une acquisition publique, partielle ou totale, à un prix encadré par l’État, pour pouvoir reconstruire. « On ne peut plus attendre que les choses s’aggravent », tranche Jean-Luc Moudenc, le maire, qui veut désormais « parler de solutions plutôt que de drames ».
150 copropriétés fragiles identifiées
En coulisses, les agents de Toulouse Métropole, épaulés par Europolia, ont lancé une opération inédite : scanner tout le centre ancien pour identifier les copropriétés en difficulté. Résultat, 150 bâtiments sont ciblés, souvent sans syndic, avec des impayés chroniques ou des logements à l’abandon.
Les points chauds sont « Arnaud Bernard, le secteur Esquirol Carmes, mais aussi Bayard et Saint-Aubin nord », a détaillé le maire lors d’un point presse, hier au Capitole. Des zones où l’habitat ancien, morcelé, est souvent détenu par de petits propriétaires aux revenus modestes, incapables d’assumer les coûts d’une rénovation.
Deux leviers : Popac et Opah-RU
C’est là qu’interviennent deux outils à coordonner. Le POPAC (Programme opérationnel préventif d’accompagnement des copropriétés) vise à proposer de l’aide avant que les bâtiments ne tombent en ruine. Un accompagnement juridique, technique et administratif sera proposé dès cette année aux syndics, et même… aux immeubles sans syndic.

L’OPAH-RU (Opération programmée d’amélioration de l’habitat en renouvellement urbain), elle, s’attaque aux immeubles anciens et aux commerces en rez-de-chaussée, avec une logique de quartier. Elle inclut aussi les espaces publics et les travaux énergétiques.
Les deux programmes couvrent les mêmes zones. « Une délibération sera votée le 19 juin, avec mise en œuvre en 2026 », annonce Jean-Luc Moudenc.
« On nous aide, mais ça reste un labyrinthe »
Du côté des petites copropriétés, les choses avancent. Dans une cour du quartier Saint-Sernin, une responsable de conseil syndical confie : « Sans aide, on n’aurait pas pu refaire les balcons, consolider le plancher ». La Métropole a missionné le cabinet Urbanis pour les accompagner, et apporter des aides logistiques et financières.
En tout, 5 800 logements ont été rénovés entre 2018 et 2025, pour un budget de 90 M€. La Métropole veut faire mieux en « coordonnant tout ce qui existe », plutôt que de créer de nouveaux dispositifs.
La possibilité d’exproprier bientôt donnée par la loi
Autre enjeu : les 200 immeubles vacants recensés, souvent invisibles du grand public. Le taux de vacance structurelle atteint 1 %, « ce qui est très peu mais toujours trop », selon Thierry Chaumier, responsable habitat à Toulouse Métropole.
Certains logements sont inhabitables, d’autres attendent une succession ou une revente. Toulouse étudie aussi la possibilité d’exproprier, une fois les décrets d’application de la loi sur l’habitat dégradé publiés cet été. « Une épée de Damoclès, mais nécessaire », estime Jean-Luc Moudenc.
Une étude jusqu’en 2025, pour une politique de long terme
La cartographie fine des immeubles à risque se poursuivra jusqu’à fin 2025, avec une démarche d’échantillonnage dans les 150 copropriétés repérées. « L’idée est de passer d’un traitement au cas par cas à une vraie stratégie préventive de masse », explique Bertrand Cambos, chef de projet chez Europolia.
Et derrière cette politique, un enjeu central : éviter que les quartiers historiques ne se vident ou ne se dégradent, au détriment des habitants comme du patrimoine.