C’est un énorme coup de gueule qui dure près de 3 minutes, signé Didier Guillot, restaurateur à Labarthe-sur-Lèze, au sud de Toulouse. Ce coup de gueule, le gérant de la Villa Romana, un restaurant de cuisine traditionnelle et du marché, a attendu d’avoir 58 ans, et des décennies dans la restauration, pour le pousser ce mardi 3 juin 2025. « C’est peut-être la fin et je pense que notre chère banque ne nous aide pas trop, donc, en fait, on en a vraiment marre. Je n’attends pas quoi que ce soit, mais je fais ce message pour dire stop à tout ça, à ces gros qui nous crèvent. On fait des 15 heures par jour et on n’est pas considérés, pas rappelés… c’est infernal. Moi, j’arrive à 58 ans, et on ne comprend plus rien, et on a juste envie d’une chose, c’est de partir et d’arrêter tout ça. C’est malheureux… ». Dans son viseur, sa banque, La Banque Populaire, et plus largement le système banquier qui mettrait la tête dans le seau aux artisans, aux agriculteurs et aux commerçants. Et son propre restaurant qui se retrouve en difficulté, selon lui en raison des multiples frais bancaires qui lui sont notifiés depuis deux ans. Soit 25 000 euros cumulés selon les éléments qu’il a communiqués à Actu Toulouse. Sa charge est d’ores et déjà devenue virale sur les réseaux sociaux et les soutiens sont nombreux à affluer. Didier Guillot raconte à Actu Toulouse son courroux.
Des frais bancaires qui s’élèvent à 25 000 euros en 2 ans
Dans le Muretain, Didier Guillot est loin d’être un inconnu. Pendant une vingtaine d’années, il a tenu La Bohème, devenu une institution à Muret, puis, il y a six ans et demi, il a repris la Villa Romana. Dans cette commune, la Villa Romana, c’est plus qu’un restaurant, c’est un lieu de rencontres, d’échanges… Mais depuis quelque temps, cela ne va plus vraiment.
« Je rembourse mon Prêt garanti par l’État qui m’a permis d’investir durant la période du Covid. Il me reste 18 000 euros à rembourser sur les 60 000 euros que j’ai reçus, mais alors que j’aurais dû augmenter mon activité de 20 % par rapport à l’avant Covid pour pouvoir absorber ce remboursement, les frais de fonctionnement en hausse avec l’augmentation des denrées alimentaires et de l’électricité, elle a baissé de 10 %. L’activité reste viable, mais je n’ai plus de trésorerie. J’ai toujours des rentrées d’argent, notamment en fin de semaine, mais ces rentrées, ma banque ne les enregistre que le lundi, et, entre-temps, j’ai des chèques qui sont refusés. Depuis deux ans, ce sont 25 000 euros de frais bancaires qui m’ont été prélevés. C’est 5 % de mon chiffre d’affaires. Au lieu de m’aider à passer un cap difficile alors que je ne lui ai jamais rien demandé, ma banque me met la tête sous l’eau », témoigne le restaurateur.
Une colère froide, une vidéo largement relayée
Sur sa vidéo déjà largement relayée, sa colère est froide :
« Depuis 2 ans, elle nous interdit tout découvert alors que l’activité a diminué et que tout a augmenté. On se retrouve avec un partenaire qui nous inflige des frais de rejet d’une somme énormissime. On est en train de nous assassiner à petit feu. On essaye de les appeler, mais on a aucun retour… Notre chère banque ne nous aide pas trop… »
« Il y a un manque de considération et d’humanité »
Il embraye auprès d’Actu Toulouse :
« Je suis en colère contre ma banque et plus largement contre le système. Il y a un manque de considération et d’humanité. Quand j’essaye d’avoir la banque, personne ne me rappelle… C’est là qu’on s’aperçoit qu’on n’est rien… Et depuis que j’ai posté ce message, je reçois énormément d’appels de restaurateurs, d’agriculteurs, d’artisans, qui vivent la même chose. Je ne suis pas seul ».
Que demande le restaurateur pour l’avenir ?
« Aujourd’hui, mes frais bancaires me coûtent plus cher que mon principal fournisseur ou que mon loyer… C’est énorme. Je prends des coups de matraque… Je demande juste un peu de considération et un partenaire qui me donne un coup de pouce en me remboursant ces frais bancaires », explique-t-il.
Une cagnotte leetchi lancée
En attendant cet éventuel « coup de pouce », ce sont ses clients qui se mobilisent. Une cagnotte Leetchi a été lancée.
« Derrière La Villa Romana, il y a un homme passionné, un petit restaurateur qui a mis tout son cœur, son temps et ses économies dans ce lieu chaleureux où vous venez partager un bon repas, un moment en famille, une soirée entre amis. Mais aujourd’hui, comme beaucoup d’autres petits établissements, La Villa Romana traverse une période difficile. Les frais bancaires qui s’accumulent, une dette qui se creuse, et une situation économique qui pèse lourd… Le rêve d’une vie est en péril. Ce restaurant, ce n’est pas juste une affaire. C’est une passion, un combat quotidien, un lieu de vie ici à Labarthe Et aujourd’hui, il a besoin d’un coup de pouce », expliquent les soutiens de la Villa Romana.
Ce mercredi 4 juin 2025, près de 1400 euros avaient déjà été collectés.
Contactée par Actu Toulouse, la banque de Didier Guillot, La Banque Populaire, a réagi par la voix de son service communication :
« La banque a été très attentive à la situation de son client. Elle l’accompagne depuis des mois pour l’aider à surmonter une situation délicate. Elle lui a apporté des conseils, en lien avec son comptable, dès le mois de janvier 2024. Elle est prête à le recevoir à nouveau pour trouver une solution pérenne avec lui ».
Les frais d’insuffisance de commission : comment ça marche?
Didier Guillot est confronté à des frais d’insuffisance de provision. La Banque de France explique sur son site ce que représentent ces frais (pour un professionnel ou un particulier) et comment ils sont encadrés :
« Lorsqu’une banque s’interroge sur le paiement ou non d’une opération, car le compte de son client n’a pas la provision suffisante pour l’honorer, cela peut constituer un incident ou une irrégularité de paiement, susceptible de donner lieu à prélèvement(s) de frais. Ces frais peuvent selon les cas et selon les établissements porter les intitulés suivants : commissions d’intervention, frais de rejet de chèque ou de prélèvement pour défaut de provision, frais de non exécution de virement pour défaut de provision, frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé, frais d’opposition de la carte par la banque, frais de saisie attribution ou de saisie administrative à tiers détenteur. Certains frais bancaires et notamment ceux liés aux incidents de paiement sont réglementés et plafonnés par la règlementation.