« Elle a montré à ceux qui en doutaient encore le vrai visage de la direction. C’était du blabla ». Tels sont les mots de Pauline Salingue, l’une des membres de l’intersyndicale CGT-SUD du CHU de Toulouse, qui a négocié avec le comité directeur lors d’une réunion ce mardi 17 juin 2025 à l’Hôtel-Dieu. Un événement qui fait suite à dix jours d’une grève partie du pôle psychiatrie, qui s’est d’après elle « propagée à tous les services » de l’hôpital.
Pas d’avancée, malgré les attentes
Un rassemblement qui n’a donné “aucun mouvement”, selon elle. “Ils ne sont pas capables de faire le mea culpa à propos de leurs erreurs. À partir de là, rien ne peut avancer”. Cet échec représente une grande déception pour cette syndicaliste.
Sans surprise, la direction du CHU n’est pas du même avis. Concernant les psychiatres, elle affirme être attentive à « maintenir un dialogue régulier et constructif avec les professionnels afin de les soutenir ». Du côté de la pédiatrie, elle dit avoir « maintenu la discussion, ouverte et constructive et, visant à accompagner ses professionnels en cohérence avec l’activité. »

Des conditions de travail épuisantes
Les attentes autour du rassemblement étaient grandes, côté gréviste. « On souhaite que nos revendications soient enfin entendues« , expliquait l’une d’entre eux, qui a préféré rester anonyme. « On veut que les conditions soient à nouveau réunies pour un environnement propice à de bons soins ». Malena, psychiatre, confirmait : “Il faut qu’on rehausse la qualité de nos conditions de travail, et de fait celle de l’accueil des patients, qu’on revienne à la réalité qui fut un temps la nôtre ».
Ces soignants dénoncent des conditions de travail qui, aujourd’hui, ne sont plus supportables. “Elles ne sont pas dignes”, “C’est de plus en plus compliqué”, disent-ils à l’unisson. Olivier Marmet, éducateur spécialisé en psychiatrie et représentant de la CGT, détaille : « Tout le monde travaille énormément, trop sans doute. Mes collègues sont soumis à des charges mentales et physiques importantes. Ils sont épuisés”. Il se désole : “On profite de notre engagement pour nous faire faire n’importe quoi ». Avant de conclure : “Nombre sont arrêtés pour burn-out, ils n’en peuvent plus. S’il n’y a pas d’action, ce sera de pire en pire », déplore Olivier Marmet.
Un soutien de la direction
Autre point de crispation : la flexibilité forcée du personnel. « Le manque de soignants entraîne l’arrivée de gens non formés dans les services », livre cet éducateur spécialisé. “Dans des domaines comme la psychiatrie, c’est totalement contre-productif. Des patients qui ont besoin de cadre se retrouvent avec du mouvement constant”. Il poursuit : “Même pour nous, cela n’est pas efficace. On nous exige une souplesse folle, on ne connaît même plus les services dans lesquels on travaille”.
La direction du CHU contredit : « Face aux difficultés exprimées par les équipes dès début 2024, un soutien a été apporté par la direction des soins du CHU », explique-t-elle, avant de continuer : « Le remplacement des absences est par ailleurs garanti : pour chaque agent absent, un remplacement un pour un est systématiquement assuré, permettant de maintenir les effectifs prévus ».

Deux visions divergentes
Les soignants insistent sur cette divergence avec la direction. “Ils ont une politique qui ne va pas en accord avec nos idées, ils réduisent les effectifs en pensant qu’une bonne organisation suffira. Ils veulent se débarrasser des services de soin qui ne sont pas rentables”, lance le représentant de la CGT. “Ils refusent de recruter là où ils considèrent qu’il n’y a pas de sous-effectifs, malgré nos demandes. Alors que nous sommes les mieux placés pour le savoir”, continue Pauline Salingue.
La direction du CHU assure de son côté poursuivre « le déploiement des dispositifs de renforcement des urgences psychiatriques, retenus dans le cadre du Pacte de refondation de la psychiatrie en Haute-Garonne. Les besoins de renfort au cours des trois prochains mois pourront être réévalués en fonction de l’évolution de l’absentéisme », complète-t-elle.
Un mouvement d’ampleur
La direction du CHU se défend aussi en mettant en avant les huit lits et dix box ouverts en psychiatrie, ainsi que les six recrutements opérés sur les différents services. Elle met aussi en avant d’une unité de réanimation pédiatrique qui fonctionne avec des effectifs supérieurs au seuil réglementaire. L’Hôpital se dit également “attentif à maintenir un dialogue régulier et constructif avec les professionnels afin de les soutenir.” Elle confie aussi que « des actions complémentaires sont en cours de réflexion ou de mises en œuvre ».
Mais face à l’échec des négociations, les grévistes ne flanchent pas. “On s’en rend de plus en plus compte, il faut lutter côte à côte, cette mobilisation se construira en commun”, insiste Pauline Salingue. “On a tout de même pu tirer de cette après-midi la confirmation qu’il va falloir élever le niveau de confrontation, le nombre de grévistes et tenir, pour que nos directeurs arrivent avec de vraies propositions”. Elle conclut : “Ce sera long. On se dirige vers un mouvement d’ampleur ».