« En 2026 ici ouvrira votre futur Intermarché ». Depuis plusieurs semaines, une banderole annonce la couleur sur l’avenue des Pyrénées, à Muret (Haute-Garonne), près de Toulouse, où le supermarché historique du sud de la ville avait été ravagé par un incendie criminel il y a deux ans. Mais ce magasin qui se situera à quelques centaines de mètres du tout nouveau Centre commercial des Portes des Pyrénées, dont les travaux débutent cet été, va-t-il réellement rouvrir ? Et quand commenceraient les travaux ? Éléments de réponse.
Un permis pour reconstruire l’Intermarché brûlé
Pour rappel, vendredi 15 décembre 2023, André Mandement, le maire (PS) de Muret avait, contre toute attente, donné son feu vert et validé un permis de construire du magasin Intermarché de Muret-Sud, détruit par les flammes quelques mois plus tôt, et qui avait par la suite… licencié tous ses salariés.
« Je ne comprends rien à la stratégie d’Intermarché », confiait ensuite André Mandement à Actu Toulouse, ne cachant pas ses doutes sur les réelles velléités de l’enseigne.
Que prévoit ce supermarché ?
Que ferait Intermarché, à Muret-Sud ? Sur le papier, le permis déposé par la SA Immobilière européenne des Mousquetaires prévoit grosso modo le même magasin que celui que les habitants ont connu par le passé : sur un terrain de 13 447 m², elle est autorisée à reconstruire l’ensemble de la surface de vente dont elle disposait (soit 3 200 m² de surface plancher, pour 1 700 m² d’espace de vente) avec sa station-service, son aire de stationnement, mais aussi une nouvelle ombrière photovoltaïque.
« Le chiffre d’affaires n’était pas là », avance le maire
Sauf que 18 mois après l’autorisation d’urbanisme, le chantier n’a pas débuté, et le site semble totalement à l’abandon… à l’exception de cette banderole qui annonce donc une réouverture en 2026. Un nouvel Intermarché sur l’avenue des Pyrénées ? Bien qu’il y ait autorisé sa reconstruction, le maire de Muret n’y croit pas : « Ça fait deux ans qu’il a brûlé et il ne s’est jamais rien passé », observe l’édile.
En général, quand ça marche, deux mois après un tel sinistre, c’est reparti. Mais là, il y avait quelque chose qui n’allait pas trop : le chiffre d’affaires n’était pas là…

« Qui pourrait mettre 15 millions d’euros là ? »
Alors que les travaux de construction de l’Hyper U, dernier mastodonte du commerce local dans l’agglo de Toulouse, doivent débuter en août au bout de l’avenue des Pyrénées pour une ouverture annoncée « fin 2026 », y aura-t-il de la place dans le bassin du Muretain pour ce nouveau supermarché ? Aux yeux du maire, ce serait aux risques et périls du porteur de projet, si tant est qu’il y en ait un…
Je ne sais pas qui pourrait mettre 15 millions d’euros pour refaire un Intermarché là, alors que trois mois après son arrivée, la grosse machine Hyper U ouvrirait à 500 mètres à vol d’oiseau. D’autant plus qu’entre les deux, il y a aussi un Aldi qui a déposé un permis de construire pour s’agrandir…
« Les travaux débuteront courant juillet 2025 », annoncent les Mousquetaires
« L’ouverture de l’Intermarché de Muret aura bien lieu au printemps / rentrée 2026″, assurent pourtant de leur côté Les Mousquetaires, ce mercredi 25 juin, après de multiples relances d’Actu Toulouse. Ils s’avancent même sur un calendrier de début du chantier.
Les travaux débuteront courant juillet 2025.
« Le point de vente d’environ 1800 m2 sera un magasin de proximité, avec une attention particulière portée sur les produits frais », dit simplement l’enseigne, qui confirme : « Il disposera d’une station-service, d’une station de lavage et de bornes de recharge électrique ». D’après le groupement, « le point de vente sera géré par un chef d’entreprise indépendant ». Qui, précisément ? Elle n’en dira pas plus.
Ouvrir Intermarché ? « Un risque phénoménal »
Alors qu’ils doivent déjà absorber le rachat des magasins Casino et ferment çà et là des supermarchés, les Mousquetaires s’apprêteraient donc à s’aventurer dans une grosse bataille commerciale, en plein Muretain ? Impensable, aux yeux du maire.
Ils ont acheté un paquet de Casino et en revendent parce qu’ils n’arrivent pas à s’en sortir… Aujourd’hui, leur groupe est plutôt dans le rouge. Franchement, quel adhérent prendrait ce risque phénoménal ?
Obligatoirement un supermarché
Dans ce cas, pourquoi avoir déposé ce permis ? Simplement pour donner de la valeur, comme le suppute le maire ? « S’il dispose d’un permis de construire, c’est toujours mieux [pour une revente, NDLR] que s’il n’y en a pas », veut croire André Mandement.
« Ils peuvent faire une modification du permis pour changer l’enseigne, mais ni la forme du bâtiment, ni l’implantation, ni le fonctionnement » du site ne peuvent être touchés. Comprenez : le permis validé n’est valable que pour un magasin identique à l’ex-Intermarché de Muret-Sud.
« Ils doivent avoir fini les travaux en décembre », rappelle le maire
Autre difficulté qui laisse dubitatif le maire de la sous-préfecture de Haute-Garonne quant au retour d’Intermarché : le calendrier. En décembre, cela fera deux ans que l’élu a octroyé son permis de construire… L’enseigne est fermée depuis vendredi 17 mars 2023, et en ouvrant en 2026 comme elle l’annonce, soit peut-être plus de trois ans après la fin de son activité commerciale, l’enseigne courrait le risque de « perdre son agrément auprès de la CDAC (Commission départementale d’aménagement commercial, NDLR) ».
Ce risque est-il réel ? Interrogée, l’enseigne se mure dans le silence, alors que la préfecture n’a pas été en mesure de répondre avec précision… mais renvoie vers l’article L752-1 du Code du commerce.
Reste que si les Mousquetaires n’étaient pas dans les clous, « il leur faudrait redemander une autorisation devant la CDAC ». Or, depuis l’entrée en vigueur de la loi Climat et résilience sur le « zéro artificialisation nette », cette dernière ne valide plus que des projets au compte-goutte…
Alors, Intermarché va-t-il renaître de ses cendres ? Y a-t-il réellement un adhérent ou un franchisé prêt à s’y risquer ? Entend-il vraiment aller plus vite que son futur concurrent ? Ou est-ce un énorme coup de bluff ? Réponse sans doute dans la torpeur de l’été.