Une aide soignante du CHU de Toulouse a été victime de violences sexistes sur son lieu de travail. Les médecins puis le tribunal administratif de Toulouse ont reconnu cet accident du travail. Le CHU a fait appel de cette décision. L’audience s’est tenue la semaine dernière devant la cour administrative d’appel.
Il y a 5 ans, une aide-soignante du CHU de Toulouse qui se trouve en salle de réveil est victime de harcèlement sexuel de la part d’un collègue masculin. Elle veut que ceci soit reconnu comme accident du travail.
Nous l’appellerons LZ. C’est une jeune aide soignante (moins de 40 ans) du CHU de Toulouse. Sur son lieu de travail, des collègues font des blagues douteuses sur le célibat en salle de réveil d’un bloc du CHU toulousain. Un collègue la traite de « vaginette » (sexe de femme fabriqué en silicone qui sert de sextoy aux hommes). La blague de trop qui passe très mal; des faits qui l’ont profondément choquée, entraînant 3 mois d’arrêt et des souffrances psychologiques.
Elle porte les faits auprès du syndicat Sud-Santé qui alerte la direction. « En salle de réveil, dans les blocs, c’est souvent là que ce type de blagues se produisent, reconnaît Victor Alava de Sud-Santé. Cette blague est particulièrement choquante. Réduire une femme à une vulve en silicone, je pense que c’est vraiment excessif. Ça l’a heurtée vraiment. Je l’avais au téléphone tous les jours ».
LZ veut que ceci soit reconnu en accident de travail. Plusieurs médecins et experts reconnaissent selon le syndicat qu’il s’agit bien d’un accident du travail. Sa déclaration est alors rejetée par la direction du CHU.
Sur le site de l’Assurance maladie, voici ce que l’on peut trouver. « En tant qu’employeur vous ne pouvez pas refuser de déclarer un accident, même si vous estimez qu’il n’a pas de lien avec le travail. Dans ce dernier cas, vous pouvez émettre des réserves motivées sur le caractère professionnel de l’accident, c’est-à-dire contester le fait que l’accident soit survenu par le fait ou à l’occasion du travail. »
Accompagnée par le syndicat Sud-Santé, LZ décide alors de poursuivre le CHU en justice. Elle saisit le tribunal sur plusieurs aspects dont la reconnaissance en accident du travail et la protection fonctionnelle (mesure qui doit être prise par l’administration publique en cas d’agression ou de poursuite judiciaire liée à l’activité professionnelle).
Le tribunal administratif de Toulouse lui donne raison en première instance sur le premier aspect tout en reconnaissant que le CHU a bien réalisé le second. Son accident de travail est reconnu par le juge comme étant imputable au CHU de Toulouse. Dans un communiqué qui nous est parvenu, la direction précise. « Les faits portant sur la situation individuelle évoquée remontent à l’année 2020. Dès que celle-ci a été portée à sa connaissance, l’établissement a mis en œuvre un accompagnement adapté de la professionnelle concernée. Cette prise en charge a d’ailleurs été reconnue par la justice administrative, qui a confirmé que le CHU avait respecté l’ensemble de ses obligations de protection. »
En mars 2024, la direction décide de faire appel de la décision du tribunal administratif, exigeant l’annulation de la reconnaissance de l’accident du travail et le rejet de la demande de recours gracieux. Selon le syndicat qui a publié un réel sur Facebook, « le CHU a perdu en justice. Et là, il fait appel. On peut considérer que c’est une forme de violence institutionnelle majeure puisqu’on en rajoute à chaque procédure pour lui dire : non ce n’est pas un accident du travail. »
En première instance, pas d’avocat mais en appel oui. Des frais de justice qui ne sont pas à portée de tout salarié. « C’est assez honteux, poursuit Victor Alava. Vous condamnez cette personne à se replonger dans cette histoire et en plus, elle doit sortir beaucoup d’argent ». Spécialiste du volet juridique, le syndicaliste va plus loin : « C’est choquant que les directeurs se servent des deniers publics pour avoir un comportement outrageant ».
Cette affaire qui remonte à 2020 vient se télescoper avec le dispositif vigilance lancé en janvier 2025, avec une procédure de repérage, et traitement des problèmes. « Violences sexistes, au CHU Non c’est Non! »
Jointe par téléphone, la direction nous indique ne pas pouvoir commenter une décision de justice pas encore connue mais nous fait part de ce communiqué. « Le CHU de Toulouse réaffirme son engagement dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Cet engagement s’inscrit dans une démarche globale, structurée notamment autour du dispositif VIGILANCE, mis en place depuis janvier 2025, et dédié à la prévention, au repérage et à la prise en charge de ces situations sensibles. »
Le mardi 20 mai 2025, l’audience s’est tenue devant la cour administrative de Toulouse. À la sortie, le syndicat reste optimiste. « Il n’y avait que des femmes à cette audience. La rapporteuse qui fait un résumé des faits et conseille les juges a donné raison au syndicat et à la plaignante. »
La décision a été mise en délibéré d’ici une quinzaine de jours. La direction du CHU ne souhaite pas communiquer plus d’ici-là. Il n’y aurait pas d’autres affaires sexistes en attente de décision de justice même si le CHU a déjà été condamné sur ce type d’affaire.
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