Une commerçante de Plaisance du Touch (Haute-Garonne), excédée de subir des vols à répétition a décidé de placarder sur sa vitrine les visages des voleuses, qui ont sévi chez elle. Une action radicale mais qui est pourtant totalement illégale. Explications.
Peut-on tout faire pour se protéger des vols lorsque l’on est commerçant ? C’est la question qui se pose, après qu’une responsable d’un magasin près de Toulouse (Haute-Garonne) a décidé de rendre public le visage de ses voleurs.
Muriel Pezzuti n’a pas hésité à placarder sur la vitrine de son magasin de Tournefeuille (31), le visage de 3 femmes, venues voler dans sa boutique. Cette pratique illégale s’appelle le « name and shame ». • © FTV
Comme tous les matins, Muriel Pezzuti ouvre sa boutique d’articles de puériculture. Depuis quelques semaines deux photos ont pris place sur la vitrine : des captures d’écran de ses caméras de vidéosurveillance.
Sur la droite de l’image, Muriel Muriel Pezzutti a découvert trois personnes en train de dévaliser ses rayons. • © Muriel Muriel Pezzutti
Muriel y a identifié trois femmes en train de voler des vêtements à deux pas de son comptoir de caisse : « Elles ont chargé au maximum leur sac de courses, ont feint de me poser une question et elles sont reparties avec la marchandise sans même qu’on s’en rende compte », témoigne Muriel. La caméra de surveillance a, elle, tout enregistré.
Le préjudice est lourd : 2300 €. Alors Muriel n’a pas hésité à afficher le visage des voleuses. Mais la pratique du « name and shame », importée d’Angleterre, est totalement illégale en France : « Elle touche à deux fondamentaux, que sont la vie privée et la présomption d’innocence », nous confie une avocate toulousaine.
Depuis quelques années, elle se multiplie pourtant chez les commerçants et sur les réseaux sociaux au mépris de la loi et de l’article 226-1 du Code pénal, qui interdit de porter atteinte à la vie d’autrui « en fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé ».
Muriel risque gros. Le fait de porter atteinte à la vie privée est puni d’un an d’emprisonnement et 45 000 € d’amende, mais la commerçante assume : « Je serai bien contente qu’elles portent plainte », affirme-t-elle. « Au moins je saurai qui c’est. Mais je sais qu’il n’y aura pas de suite ».
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— RAS_LE_VOL (@raslevol) March 19, 2024
Début 2024, face à l’exaspération des commerçants, victimes de vols en bandes organisées, le député Modem de l’Ain Romain Dembié avait présenté un projet de loi pour autoriser la pratique « afin d’aider les enquêteurs à identifier les voleurs », avait-il précisé à l’époque.
Mais depuis, la dissolution de l’assemblée nationale est passée par là. Le projet n’est jamais réapparu devant les députés. Quant à Muriel, elle a retrouvé une partie de ses vêtements en vente dans un vide-grenier toulousain.
(Article rédigé à partir du reportage d’Aude Chéron et Nathalie Fournis)
https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse