La multiplication de mise en péril d’immeubles dans le centre ancien de Toulouse (Haute-Garonne), depuis l’effondrement d’un bâtiment de la rue Saint-Rome en mars 2024, inquiète les habitants. Mais le sujet est aussi devenu politique à moins d’un an des élections municipales.
Le risque d’effondrement du bâti ancien à Toulouse (Haute-Garonne) devient un sujet politique à moins d’un an des municipales. Attaquée par l’opposition, la municipalité en appelle à la responsabilité des propriétaires.
Ce dimanche 13 avril, c’est cette fois dans la rue Castelbou, à quelques pas de la célèbre basique Saint-Sernin qu’une dizaine de logements ont dû être évacués, après l’effondrement partiel d’un mur en brique, commun à plusieurs bâtiments. Quatre jours à peine après la mise en péril d’un immeuble, rue des Filatiers.
Depuis l’effondrement il y a un an d’un immeuble, situé à 100 mètres de la place du Capitole, à Toulouse, on ne compte plus les évacuations d’habitations anciennes dans le centre historique. Au total, en 2024 et 2025, 56 arrêtés d’interdiction d’accès, dont 29 de mise en sécurité d’urgence ont été pris, selon les chiffres de la mairie.
À quelques mois des municipales, ces incidents à répétition ont pris un tour politique : « Combien d’effondrements faudra-t-il pour que le maire sorte enfin de sa posture réactive et engage une réelle politique de prévention ? », réagit le groupe d’opposition Toulouse écologiste et solidaire.
Encore des immeubles en danger dans le centre de Toulouse. La mairie manque à ses obligations en matière de protection et de contrôle de bâtiment voilà le résultats. Mr Moundenc doit partir et laisser place à François Piquemal. https://t.co/TyqVnnwKSe
— Crachetahaineducapital (@CrashLeKapital) April 14, 2025
François Piquemal, député LFI de Toulouse et candidat à la mairie, décrit pour l’AFP une « situation alarmante » et accuse le maire Jean-Luc Moudenc (DVD) d’avoir « procrastiné » en mettant « en danger beaucoup d’habitants et d’habitantes ».
Côté municipalité, la conseillère Claire Nison se défend : « On n’a pas attendu que cela s’effondre pour agir, on sait parfaitement que l’on a un centre historique fragile ». La déléguée à l’habitat dégradé et à la sécurité des bâtiments, affirme même que « la multiplication des signalements est le signe d’une vigilance accrue et non d’une situation qui s’aggrave ».
Un point de vue partagé par l’administrateur de l’association de défense du patrimoine « Les Toulousains de Toulouse » : « C’est extrêmement sain car cela montre qu’il y a une prise de conscience de tout le monde », explique Jean-François Latger, architecte et urbaniste.
Alors comment expliquer le phénomène ? Les facteurs de risque d’effondrement semblent être multiples pour cet habitat, vieux de plusieurs siècles et fait souvent de brique, de terre cuite ou de colombages en bois, des matériaux très sensibles à l’eau : « Dans les évacuations de ces derniers mois, on est très loin d’une seule problématique qui expliquerait tout », fait remarquer Claude Jam, expert en bâtiment auprès de la cour d’appel de Toulouse.
Les infiltrations d’eau sont souvent un élément déterminant. Mais d’autres facteurs rentrent en ligne de compte. L’impact du changement climatique est également évoqué. La ville rose est concernée par des « effets de sol, avec des gonflements ou rétrécissements d’argile », précise Mme Nison, mais « de là à lier ce phénomène-là au fait d’avoir, d’un seul coup, plus de fissures, on ne peut pas clairement l’établir ».
Alors à qui la faute ? Aux travaux imprudents menés sur des structures déjà fragilisées ? Au manque de suivi sur les toitures ou les fondations ? La municipalité a choisi de communiquer auprès des syndics, propriétaires et copropriétaires qui ont « renforcé les consultations sur les questions d’architecture et de pathologies des bâtiments ».
Un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV), approuvé récemment en préfecture, doit également permettre de mieux préserver le centre historique. L’opposition municipale préconise, elle, l’extension du permis de louer pour accroître le droit de regard public sur le bâti mais la municipalité le juge trop complexe à grande échelle.
L’entrée en vigueur de la loi du 9 avril 2024 sur l’habitat dégradé pourrait s’avérer décisive. La solution passera peut-être aussi par « une culture de responsabilité » des propriétaires : « Dans un centre ancien, on endosse une double responsabilité, affirme Jean-François Latger. « Celle de faire fructifier un patrimoine immobilier privé mais aussi de créer les conditions de sa sauvegarde ».
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