Transformer la rue Alsace-Lorraine en zone piétonne totale ? L’initiative « Toulouse Pieds à Terre » relance le débat entre sécurité des piétons et mobilité des deux-roues. Un projet qui divise et questionne l’aménagement urbain.
À l’initiative du projet « Toulouse Pieds à Terre » se trouve Richard Mebaoudj, candidat aux municipales 2026 et membre de la Liste des Piétonnes et Piétons en Colère. En attente de la décision de la mairie de Toulouse, il poursuit sa mobilisation en suivant l’exemple de villes comme Agen et Montauban.
L’objectif de cette initiative est simple : transformer la rue Alsace-Lorraine en aire piétonne exclusive de 11 heures à 20 heures, 7 jours sur 7. Les cyclistes et trottinettistes seraient donc contraints de poser pied à terre lors de leur passage dans cette zone. « Cette grande rue est une zone problématique étant donné que les deux-roues circulent vite, et ce sans forcément respecter la priorité des piétons », explique Richard Mebaoudj.
La mise en place d’un tel dispositif permettrait, selon l’association, d’améliorer la sécurité et le confort des piétons qui ne seraient plus mis en danger par des deux-roues en « transit » dans la rue. En effet, les membres de l’association 60 millions de piétons ont eux aussi confirmé leur volonté de changement quant à la sécurisation de la rue Alsace-Lorraine.
Des règles de circulation qui évoluent
Malgré l’application du code de la rue depuis 2024, la loi sur l’évaluation de la vitesse semble complexe à appliquer, selon Richard Mebaoudj. « Les forces de l’ordre, tant municipales que nationales, sont dans l’incapacité d’évaluer l’allure des cyclistes. De plus, en France, la vitesse dite ‘au pas’ n’est même pas fixée, ce qui complique les choses. »
Une expérimentation de 6 mois concernant des marquages de la rue a permis d’évaluer la circulation des piétons et deux-roues. Encouragé par la maire du quartier centre Julie Escudier, ce test va être mis à l’étude afin de constater les changements ou non occasionnés durant la période. Cette démarche s’inscrit dans un cadre de sensibilisation qui accentuerait les déplacements à pied des Toulousains, selon l’association Piétons en Colère.

Un projet dénoncé par le « lobby » du vélo
En effet, si cette initiative ravit les piétons de la rue Alsace-Lorraine, les cyclistes et trottinettistes ne sont pas du même avis. « L’aboutissement de ce projet pénaliserait à la fois les usagers quotidiens des deux-roues et les professionnels qui livrent à vélo. Avant l’adoption de cette mesure coercitive, la mairie doit proposer une alternative sécurisée et efficace dans l’hypercentre », défend Boris Kozlow, président de l’association 2 Pieds 2 Roues.
Ces derniers, conscients des mauvaises pratiques de certains, rappellent tout de même que selon la sécurité routière, 83 % des accidents en 2023 étaient causés par des automobilistes et non des cyclistes. « Nous ne cautionnons en aucun cas les comportements illégaux comme le ‘débridage’ des trottinettes électriques. En revanche, il est important de défendre les usagers quotidiens qui eux, malgré le respect des règles, subissent les conséquences », confirme Boris Kozlow.
L’association dénonce un manque d’alternative quant au passage des cyclistes et trottinettistes dans la grande rue Alsace-Lorraine. « L’essentiel serait peut-être de rediriger les plans d’actions avec par exemple de nouvelles mesures de limitation des véhicules motorisés ; comme vers Capitole. Il serait aussi important d’envisager une meilleure organisation des stationnements pour les deux-roues motorisés qui obstruent les emplacements réservés aux cyclistes », ajoute le président de l’association 2P2R.
Mais quelles sont les mesures mises en place par la mairie de Toulouse ?
« Notre volonté est de rendre les aires piétonnes entièrement sécurisées. La démarche menée par l’association 60 millions de piétons et nous-mêmes vient s’inscrire dans un schéma pédagogique de sensibilisation aux bonnes conduites vis-à-vis des piétons de tous âges. Les policiers municipaux sont formés et sensibilisés à la pédagogie nécessaire concernant la vitesse de circulation des deux roues « , précise Maxime Boyer, adjoint au maire en charge de la voirie et de la circulation. La mairie de Toulouse confirme ainsi l’idée du projet « Pied à Terre », la décision dépendra des citoyens qui l’empruntent chaque jour. « Nous avons mis en place une expérimentation dans la rue qui s’est conclue par des questionnaires adressés aux habitants, commerçants de la rue, piétons et cyclistes. Les résultats nous permettront d’obtenir un verdict. »