Entrepreneuse audacieuse, Katie Nat incarne une vision globale de la beauté à Toulouse. Mode, coiffure, esthétique : son énergie débordante bouscule les codes. Elle réussit à tout mener de front sans jamais s’essouffler. Portrait.
Katie Nat apparaît en tenue de sport vert flashy, tout sourire. Menue, aussi bronzée que musclée, l’entrepreneuse toulousaine nous précède dans sa belle maison du Busca, tout en s’excusant du bazar. « Je suis rentrée des Corbières tôt ce matin, puis je suis allée nager, mais je suis à vous. » À l’intérieur, le mobilier design et vintage côtoie de belles pièces d’art. « C’est mon petit musée à moi », lâche-t-elle. Elle prépare un café dans sa cuisine noire, avant de monter à l’étage se changer pour la photo. « Je ne vais pas faire compliqué, je ne le suis pas, de toute façon. » Elle redescend pieds nus, jean et chemise blanche nouée. Et prend la pose, perchée sur un énorme crâne, l’œuvre d’un ami, Laurent Esquerré, avant de se lover dans un fauteuil au velours pourpre.

Derrière ses lunettes fumées, son regard est très jeune. À 57 ans, Katie Nat gère d’une main de maître trois magasins de mode, un salon de coiffure et d’esthétique sous la marque By Katie Nat au centre-ville, et 17 salariés, tout en organisant des événements et en créant ses propres vêtements. « Inutile de faire un diagnostic pour comprendre que je suis une hyperactive. »
Des fraises tagada autour du café
Malgré tout, elle a gardé une âme d’enfant. « J’ai commencé à travailler à l’âge de 15 ans dans la coiffure. On a tous envie de se raccrocher à des choses d’enfance. J’ai toujours l’impression qu’il faut mettre des fraises tagada autour d’un café. Quand j’ai créé mon premier parfum, j’ai cherché à y mettre toutes les odeurs de mon enfance. »
Petite, Katie aimait fabriquer des habits à ses poupées et les coiffer : « Il y avait vraiment une intégralité de la beauté qui était importante, déjà, pour moi. » Une approche globale qu’elle a perpétuée au cours de sa carrière, en multipliant les activités : coiffure, vêtements, accessoires, esthétique… Portée par une quête de l’harmonie, elle a le goût du changement. « À 7 ans, mes parents partaient et je leur déménageais les meubles. Je vais regarder quelqu’un, je vais lui modifier sa coiffure. »

« Coiffer, ce n’est pas seulement être coiffeuse »
Elle apprend le métier comme on se forme à une discipline artistique. Adolescente, elle côtoie Pascal Costes, avec qui elle est restée connectée depuis, puis entre chez Jacques Dessange, à la « belle époque ». Elle y restera 21 ans. » C’était une période très, très créative. On ne comptait pas nos heures. La passion nous emportait, confie-t-elle. J’ai appris beaucoup de choses. Il fallait savoir décoiffer, c’était tout un art. »
Elle officie à plusieurs adresses, avant de travailler « en premier étage », boulevard Carnot, avec une clientèle privilégiée, qui vient pour son style sur-mesure. « C’était comme un nid, où je pouvais exprimer ma créativité comme je voulais. » De l’art, on vous dit : « J’ai passé ma vie à faire comprendre que coiffer, ce n’est pas seulement être coiffeuse. C’est abattre les cloisons, essayer d’imaginer comment la femme peut être. Ce n’est pas lui mettre la tête dans une case. Parfois, quand j’enlevais le peignoir, je trouvais dommage que sa tenue n’aille pas avec. »
Assez naturellement, elle se met à dessiner des vêtements et des sacs, pendant sa grossesse, en 2000. Elle accouche de jumeaux et développe sa marque No Trash. Place Rouaix, elle crée son propre salon de coiffure au premier étage d’un bel immeuble. Deux ans plus tard, elle aménage le rez-de-chaussée et y propose une sélection de vêtements, qu’elle choisit chez des créateurs parisiens. « On y entrait uniquement sur sonnette, j’ai été assez critiquée pour ça, se rappelle-t-elle. Ça m’a donné envie d’organiser un événement visible de tous, à l’extérieur. » Elle invite ainsi deux graffeurs à créer une œuvre sur sa façade, une « explosion à la Marvel » qui jaillit des fenêtres. L’année suivante, elle crée une vidéoprojection, mettant en scène un oiseau qui se balance, avec la contribution de son mari, Paul Monnier, designer sonore.
Les dates clefs
1968 Naissance à Montauban
1985 Comment à travailler chez Jacques Dessange à Toulouse
1999 Commence à créer des sacs et des vêtements
2007 Ouvre son salon de coiffure place Rouaix
2009 Ouvre la boutique de vêtements au rez-de-chaussée
2011 Ouvre un deuxième magasin
2017 Lance la marque Dedikate
2020 Troisième magasin rue Cantegril
Depuis, deux autres boutiques ont vu le jour et Katie a lancé une nouvelle marque de vêtements, Dedikate. « Je n’ai pas vu ma réussite, j’ai trop travaillé », sourit-elle. Elle est pourtant bien là. Pendant le Covid, elle a aussi initié la Bonne idée, un regroupement d’artisans et de commerçants qui organisent des événements récurrents.
La vie de Katie est pleine de rebondissements. Un accident de voiture, survenu il y a quatre ans, l’a momentanément privée de l’usage d’une main. Elle a finalement pu recommencer à coiffer… avec joie. Pour se ressourcer, elle va régulièrement nager avec les Dauphins du Toec, sa « seconde famille », et s’échappe dans les Corbières, où elle a une maison de campagne. « Là-bas, rien n’est fragile. Je vais me balader dans les vignes, ça m’apaise. »