La saisie sur salaire change de mains : les commissaires de justice remplacent les tribunaux dès le 1er juillet. Cette réforme majeure, visant à déjudiciariser, bouleverse les procédures pour 9 000 dossiers en cours.
La justice française s’apprête à vivre un changement notable à compter du 1er juillet pour les personnes endettées faisant l’objet de saisies sur salaires. En vertu d’une loi d’orientation et de programmation du ministère de la Justice votée en 2023, complétée par un décret publié en février dernier, une réforme prévoit que la gestion de ces procédures soit transférée des tribunaux judiciaires vers les commissaires de justice (ex-huissiers de justice).
Pierre Viard, président du tribunal judiciaire de Toulouse, a souhaité alerter les citoyens sur cette évolution. « Il s’agit d’un sujet qui concerne la justice civile du quotidien, directement lié à la vie des citoyens. »
Rationalisation des coûts
Dans un souci de rationalisation des coûts, le ministère a décidé de confier aux commissaires de justice la gestion complète des saisies sur salaire : autorisation, traitement et distribution des fonds saisis. « Cela s’inscrit dans une tendance à la déjudiciarisation de certains contentieux », observe le président Viard. Pierre Casimiro, commissaire de justice, précise de son côté qu’il s’agit aussi de « libérer des moyens et du personnel pour la justice ».
Concrètement, à partir du 1er juillet, les créanciers ne pourront plus saisir le tribunal judiciaire pour obtenir une saisie sur salaire. « Le tribunal n’interviendra désormais qu’en cas de contestation entre les parties, afin de trancher le différend », souligne le président du tribunal.
Quels impacts sur les procédures en cours
Ce changement affectera les quelque 9 000 dossiers en cours. « Environ 9 000 dossiers en cours seront progressivement transférés aux commissaires de justice », alerte Pierre Viard. Ce transfert entraînera une suspension temporaire des prélèvements, le temps que la réforme se mette en place. Les créanciers et les tiers saisis – les employeurs chargés de prélever les sommes sur les salaires – devront désigner un commissaire de justice pour assurer le suivi.
Toutefois, tous les professionnels ne seront pas immédiatement opérationnels. « Seuls les commissaires ayant suivi une formation spécifique pourront initialement exercer ces nouvelles attributions », précise Pierre Viard, qui assure néanmoins qu’à terme, l’ensemble des commissaires de la juridiction de Toulouse sera formé.
Un accueil favorable mais vigilant
Malgré ces ajustements, la réforme suscite un certain enthousiasme. « C’est une simplification et une dématérialisation de la procédure », affirme Xavier Arnaud, président des commissaires de justice de la Cour d’appel de Toulouse.
Catherine Benoidt-Verlinde, déléguée de la bâtonnière de l’ordre des avocats, souligne quant à elle que « la procédure sort du code du travail pour rejoindre le droit de l’exécution ». Elle insiste néanmoins : « La réforme ne saurait se faire au détriment du justiciable et de ses droits fondamentaux. »