Selon les prescriptions de l’Assurance maladie pour éviter les accidents professionnels, les camions poubelles n’ont plus le droit de faire des marches arrières. Ce qui leur interdit de facto d’entrer dans les impasses, dont les habitants doivent se débrouiller comme ils peuvent. La révolte gronde dans l’agglomération toulousaine.
Bienvenue au royaume d’Ubu ! Courteline, qui fustigeait les ronds de cuir de l’administration, n’aurait sans doute pas imaginé une telle histoire. Mais les voies de la réglementation sont décidément impénétrables et ses conséquences improbables. Jugez plutôt : selon de nouvelles dispositions de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), la recommandation R437 article 3.2 pour être précis, les camions poubelles qui collectent les déchets ménagers dans les villes sont désormais interdits de marche arrière, » ce qui constitue un mode de fonctionnement anormal sauf en cas de manœuvre de repositionnement », explique sans rire le texte. Le tout au nom de la prévention des risques professionnels pour éviter tout accident.
Petite cause, grands effets, les éboueurs ne peuvent donc plus entrer dans les impasses dont ils ne peuvent pas sortir par définition en marche avant et les riverains se retrouvent sans solution pour évacuer leurs déchets ménagers quotidiens. » Nous sommes obligés de porter nos poubelles à l’entrée de la rue, s’insurge Guillaume Fumat, un habitant de l’impasse Moulive dans le quartier Saouzelong-Rangueil. Avec tous les problèmes que cela induit pour les personnes qui n’en ont pas les capacités physiques, mais aussi en termes d’environnement »…
Une situation absurde
Ce citoyen agacé a écrit derechef aux services de la collecte des ordures de Toulouse Métropole pour exposer l’absurdité de la situation. » La fameuse recommandation de l’assurance-maladie ne proscrit pas la marche arrière, mais recommande des mesures de prévention, dont la réduction de son emploi, plaide-t-il. Et visiblement, les organismes nationaux ne connaissent pas les spécificités locales. Leurs prescriptions ne peuvent qu’être grossières ». Encore un effet pervers de la centralisation ? Guillaume Fumat, en tout cas, ne veut pas laisser les choses en l’état. »La collecte s’effectue dans notre impasse depuis au moins 50 ans, sans déplorer d’incident », constate-t-il. Tout en suggérant « un mode opératoire » qui permettrait de conserver le passage des éboueurs sur le pas de la porte en préservant la sécurité des agents. » Dans notre cas le camion peut entrer dans l’impasse et faire demi-tour au niveau d’un petit parking libre à l’aube, insiste Guillaume. Ainsi, les agents resteraient en sécurité dans l’habitacle. Je les ai d’ailleurs déjà vus faire cette manœuvre ». Des suggestions frappées au coin du bon sens, qui n’ont pas trouvé d’écho au niveau de la métropole, dont il attend toujours la réponse.
« Habitants des impasses, révoltez-vous ! »
Ce qui ne l’empêche pas d’alerter les habitants des 37 communes de la métropole toulousaine. « Je pense que tous ceux qui résident dans des impasses seront intéressés de savoir qu’ils perdront leur collecte au pas de la porte dans les prochains mois ou années », prévient-il. En regrettant que cette décision ait été prise sans concertation. » Ni en interne, puisque les éboueurs que nous avons interrogés avant l’arrêt de la collecte n’étaient pas au courant, ni en externe avec les citoyens, peste Guillaume. En prime, les poubelles que nous utilisions n’ont pas été reprises et les gros containers mis à disposition au début de l’impasse sont souvent laissés ouvertes au vent d’autan. Je vous laisse imaginer les dégâts quand les vents soufflent à 90 km/h ». Et que dire de l’incohérence du nouveau dispositif sur le terrain. « Il n’y a pas de logique, la collecte impasse Moulive est interrompue, tandis que celle de l’Impasse Pons, de l’autre côté de la voie ferrée, continue », se désole Guillaume. Vous avez dit bizarre ?