Toulouse pleure une femme d’exception. Marie Vaislic, dernière survivante toulousaine des camps de la mort nazis, s’est éteinte, laissant derrière elle un legs inestimable : celui du témoignage. Déporté à 14 ans, rescapée de Ravensbrück et de Bergen-Belsen, elle aura, des années durant, incarné avec dignité et force la voix des disparus. Ses obsèques auront lieu ce jour, vendredi 2 mai, au cimetière israélite de Portet-sur-Garonne.
L’horreur des camps à 14 ans
Née à Toulouse, Marie Vaislic a été arrêtée à son domicile alors qu’elle n’était qu’une adolescente. Déportée successivement dans les camps de de Ravensbrück puis de Bergen-Belsen, elle y survivra 11 mois. « J’ai pris l’habitude de me taire », disait-elle plus tard, évoquant ce long silence qu’elle a gardé durant de nombreuses années après la guerre. Un silence imposé par la pudeur, l’indifférence et le déni ambiant.
De l’indicible à la transmission
Ce n’est que bien plus tard que Marie parvient à mettre des mots sur l’horreur :
« Elle a su raconter son expérience des camps, appris à construire un récit, à formaliser l’indicible avec réalisme, trouver les mots pour répondre aux questions sans rien éluder. »
Elle publie d’abord son propre récit de vie dans Seule à 14 ans à Ravensbrück et à Bergen-Belsen, puis coécrit un ouvrage poignant avec Marion Cocquet, Il n’y aura bientôt plus personne, paru en 2024 chez Grasset.
Une vie d’engagement et de résilience
Marie n’était pas seule dans cette traversée de l’Histoire. Son mari Jean, lui aussi déporté polonais, croise sa route à Toulouse. Leur union donnera naissance à deux fils et deux petits-fils, scellant une reconstruction familiale comme un pied de nez à la barbarie.
Cette affinité de deux compatriotes aux destins tragiques […] sont un hymne à la vie. »
Tous deux ont été décorés de la Légion d’honneur, reconnaissance de leur courage et de leur engagement.
Jean avait été déporté dans les camps d’Auschwitz-Birkenau et de Buchenwald. © Mickey Kuyo (YouTube)
Un héritage à transmettre
La disparition de Marie Vaislic marque une bascule symbolique : « c’est un pan de l’histoire de la Shoah qui disparaît ». Elle était une figure active de la mémoire, honorée récemment du grade de commandeur des Palmes académiques. Des centaines de jeunes l’ont écoutée, bouleversés, et c’est à eux qu’elle confiait, en filigrane, la responsabilité de perpétuer la mémoire.
Si le silence de Marie s’est éteint, ses mots, eux, continueront de résonner.
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