40 ans d’audace et de poésie. Ce n’est pas tous les jours qu’un établissement culturel souffle ses 40 bougies, surtout avec autant d’énergie et d’humour. Créé dans les locaux d’un ancien cinéma de l’avenue Saint-Exupéry, avant de poser ses valises aux Argoulets, le Lido s’est imposé comme un acteur majeur du cirque contemporain en France. Il a formé des générations de circassiens et circassiennes qui, à leur tour, enchantent la piste, la rue, la scène.
Et pour cet anniversaire, le Lido ne compte pas faire les choses à moitié : il sort de ses murs, s’installe dans les jardins, dans les rues, à la Grainerie, à Cugnaux, et fait vibrer Toulouse.
Les élèves amateurs du Lido […] et les étudiants en formation professionnelle de l’Esacto’Lido vous donnent rendez-vous pour fêter cela ensemble ! », invitent les organisateurs.
Le Lido regroupe ses élèves selon plusieurs groupes d’âge, des Singes & Otaries (7 ans et demi – 9 ans et demi) aux adultes. Ici un spectacle des Diablotrains (9 ans et demi – 12 ans et demi) lors de la Fête du Lido 2021. © photolosa 2021
Le cirque toulousain, une histoire de convictions
Le Lido ne s’est pas bâti en un jour. C’est au début des années 1980 qu’un groupe d’irréductibles passionnés, guidés par Henri Guichard, investit un vieux cinéma désaffecté (le Lido) pour y faire résonner leurs rêves de cirque citoyen, vivant, ancré dans les quartiers. En 1988, le Centre municipal des Arts du cirque de Toulouse voit le jour, et devient la première école de cirque toulousaine.
L’ancien Lido, situé avenue de Saint-Exupéry. © Photolosa 2008
Rapidement, il se développe en un véritable laboratoire de création, espace d’apprentissage et d’émancipation. Son influence nationale et internationale grandissant, l’école déménage en 2008 sous un chapiteau en dur des Argoulets. Au fil du temps, une formation professionnelle émerge en parallèle des enseignements amateurs. L’École Supérieure des Arts du cirque Toulouse-Occitanie voit le jour en 2019, sous le nom d’Ésacto’Lido, tout en continuant de développer sa formation auprès des amateurs via le Lido.
Ainsi, depuis ses balbutiements il y a 40 ans, le Lido est resté fidèle à ses racines et son ambition première : contribuer à la « vivacité et à l’inventivité du cirque contemporain ».
Chapiteau du Lido. © Boris Conte Photography 2022
Une fête qui déborde du chapiteau
Tout commencera le 19 juin au Jardin Raymond VI avec des « entraînements en plein air », une manière de découvrir « que le cirque ne se découvre pas seulement sur la piste ». Dès le lendemain, les spectacles s’enchaîneront, promesse d’un arc-en-ciel d’émotions.
Tout au long de l’année, le Lido dispense près de 930 heures de cours, comme au travers des Ateliers Adultes Amateurs, des stages d’initiation ou du Kiprokollectif. © Boris Conte
Le ton sera donné avec « On est pas sérieux quand on a 40 ans! », une création collective des étudiants de première année de l’Esacto’Lido. Il ouvrera les festivités avec un « rituel décalé, drôle et festif », comme un hommage vivant à l’esprit fondateur du Lido :
Sortons de nos HLM, descendons dans la rue, faisons la fête et vivons ensemble. »
Cirque de tous âges et de toutes formes
Le force du Lido, c’est aussi de mêler les générations. Des plus jeunes (comme les « Bulles en Balle, groupe de 9 ans et demi à 12 ans et demi, qui partent en randonnée sans carte dans « Bivouac ») aux ados des « Circastrics » qui interrogent le poids des normes dans « Identités remarquables », tout le monde est invité à monter sur la piste.
« Identités remarquables » du groupe de création des 12½-17½ ans. © Jean Lefranc
L’humour est naturellement omniprésent, parfois tendre, souvent décapant. Plus tard, c’est le chaos d’un tournage de cinéma dans « Oui, je le veux ! » du SimiliCircus qui investira la scène, où les réunions Zooms et les coups de stress deviennent matières à jonglage.
Une mémoire vivante
Le 22 juin, place à la nostalgie (mais joyeuse !) avec l’exposition « Histoire(S) du Lido ». Entre « costumes, accessoires, archives, photos, affiches et articles de presse », les visiteurs plongent dans quatre décennies de passion circassienne. Le public est même invité à tendre l’oreille : « Des surprises sonores, des anecdotes chuchotées […] parce que cette histoire s’écrit et se raconte encore. »
Et que dire du « Cabaret des 40 ans », véritable cocotte-minute de souvenirs et de numéros cultes ?
Le Lido a 40 ans et l’infini de possibles devant lui ! »
La fête se prolongera le lendemain avec « Le cabinet des curiosités », un spectacle hybride porté par les ateliers adultes.
La réalité suspendue à un fil, les illusions sautent de table en table sans souffler de bougies. »
Portraits d’artistes en herbe (et en feu)
Le programme déroule une galerie de personnages à la fois drôles, touchants, ou insolites. Dans « Giovanni y les invisibles », les étudiants de troisième année de l’Esacto’Lido livrent 12 projets de fin de cursus : « Shana lisait en terrasse, Eline préparait un marathon, Myriam broyait le patriarcat à la masse » : c’est drôle, foutraque et profondément humain.
La Nuit du cirque 2024. © xillok
Le 27 juin, le Kiprokollectif (collectif adulte) nous embarque dans « Baratypic », où Bob, le héros, semble s’être perdu « dans le bar des objets trouvés… ou plutôt, dans celui des personnes perdues. » Une fable absurde pleine d’acrobaties existentielles.
Le cirque, un art qui se partage
Impossible de ne pas évoquer la soirée du 29 juin, point d’orgue de cette fête d’anniversaire. D’abord avec « N’Delaya », une épopée tribale portée par des ados qui mêlent cirque et récit mythologique.
Nos chasseurs sont agiles comme des léopards. Nos anciens sont sages comme la chouette. »
© Jean Lefranc
Puis avec viendra la traditionnelle scène ouverte, moment d’improvisation collective où « un numéro de bascule avec une trompette, un spectacle de marionnettes en ombre chinoise et une funambule qui fait des échasses » peuvent surgir à tout instant. Ou pas.
Un futur sous chapiteau
Loin de la nostalgie poussiéreuse, la Fête des 40 ans du Lido est un manifeste d’avenir. Entre hommages, créations, performances hybrides et cabarets éclatés, elle rappelle que le cirque d’aujourd’hui est un art vivant, populaire, collectif. Un art qui transforme les corps et les regards. Comme l’écrivait Carl Jung, cité lors du cabaret anniversaire :
La vie commence vraiment à 40 ans, jusque-là, tout ce qu’on fait, ce ne sont que des recherches. »
Au vu de la vitalité de cette école toulousaine, on a hâte de voir les 40 prochaines années.
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