La chasse est déjà lancée à Toulouse face aux risques encourus pour l’environnement. La Xénope Lisse, une espèce exotique et invasive est devenue l’ennemie numéro 1 pour la biodiversité locale à Toulouse. Depuis novembre 2024, elle fait l’objet d’un arrêté préfectoral visant à l’éradiquer totalement des bassins dans lesquels elle a été repérée.Cet amphibien prédateur, originaire d’Afrique, est dans le collimateur des autorités depuis qu’il a colonisé trois bassins situés sur la commune de Toulouse, en bordure du périphérique sud, entre les échangeurs du Palays et du complexe scientifique. « Cette espèce opportuniste a un fort potentiel reproducteur, et elle est porteuse saine de la ranavirose et de la chytridiomycose, maladies pouvant causer de fortes mortalités chez les espèces indigènes d’amphibiens. De fait, elle constitue un risque majeur pour le fonctionnement des écosystèmes aquatiques », alertait la préfecture de Haute-Garonne. Il ne faudrait donc pas qu’elle aille coloniser d’autres zones humides de la Ville rose. Alors, une équipe du conservatoire d’espaces naturels (CEN) d’Occitanie a resserré l’étau sur un premier bassin, celui du Centre national d’études spatiales, où une communauté de ce prédateur avait fait son nid. Le résultat a été spectaculaire. Actu Toulouse vous en dit plus.
La « chasse » est lancée
La « chasse » s’est déroulée de façon très méthodique, selon un cahier des charges précis, sous l’égide du CEN Occitanie en novembre et en décembre 2024. Le site choisi a été le bassin du CNES, l’un des trois bassins colonisés à Toulouse.
« Nous avons d’abord filtré toute l’eau du bassin, on a effectué sa vidange, puis une société spécialisée a réalisé un pompage des boues. Au total, ce sont 200 individus adultes de Xénope Lisse qui ont été repêchés, puis euthanasiés avec éthique par un vétérinaire. Ce sont également des milliers de larves qui ont été sorties du bassin. Ce type d’intervention n’avait jamais été réalisée en Occitanie et l’on espère que cela a fonctionné, explique à Actu Toulouse Iris Lang, chargée de projet scientifique au sein du CEN Occitanie. CEN Occitanie qui avait sollicité cette « action urgente » en 2024.
Comment l’espèce est exterminée à Toulouse
Une opération pleine de minutie puisqu’arrivé à l’âge adulte, Xénope Lisse ne mesure que 70 à 75 mm pour un mâle, et de 90 à 130 mm pour une femelle. Et il faut parfois aller les chercher dans la boue…
La méthode pour tuer les individus pêchés avait bien été détaillée par la préfecture en novembre : « Les amphibiens adultes seront quant à eux capturés, puis se verront injecter du barbiturique en surdose pour être euthanasiés. Ils seront ensuite placés dans des sacs, stockés dans un congélateur avant d’être transportés vers une société d’équarrissage « pour élimination ».
Deux bassins confinés
Après cette première « chasse menée », que va-t-il se passer sur les deux autres bassins ?
« Ce sont les propriétaires des bassins, ici la DIRSO et Oppidéa, qui se mobilisent pour faire installer les clôtures. Sur ces chantiers, le CEN Occitanie est en conseil et appui technique. Concrètement, des clôtures de confinement ont été installées autour de l’un des bassins. Le deuxième sera clôturé fin mai. Il s’agit désormais de programmer le même type d’opération de filtrage et de vidange que celle réalisée sur le bassin du CNES. Le plus pratique serait l’été, saison durant laquelle ces bassins sont vides, mais cela nécessite des financements d’ici-là », explique Iris Lang.
Un rythme de ponte effréné
Le risque de trop attendre, c’est de voir, malgré les précautions déjà prises, cette espèce invasive prendre ses aises à Toulouse, et plus largement en Haute-Garonne, alors même « qu’elle constitue un risque majeur pour le fonctionnement des écosystèmes aquatiques », selon les autorités, et qu’une femelle peut pondre de 300 à 2 500 œufs 2 à 3 fois/an, pendant dix ans, son espérance de vie.
Mares, étangs, fossés, bassins de récupération d’eaux de pluie, bassins de lagunage, cours d’eau à faible courant, bras morts de rivières, cette grenouille exotique qui se nourrit de petits invertébrés et petits vertébrés (poissons, amphibiens dont œufs, larves et adultes) apprécie en effet tous ces environnements.
Pas de nouveaux individus sur le bassin du CNES
Avec sa capacité de déplacement, de plusieurs centaines de mètres chaque jour, pourrait rapidement l’amener ailleurs, Xénope Lisse pourrait très bien se retrouver dans l’Hers toute proche, dans le lac de Labège, et de fil en aiguille coloniser un large périmètre dans l’agglo.
« Pour l’heure le résultat sur le bassin du CNES est bon. Nous n’avons pas vu de nouveaux individus adultes en retournant sur site et les analyses effectuées sont négatives », tempère Iris Lang qui complète :
« Vu la population de Xénope Lisse qui a colonisé le nord de la France, on pensait trouver plus d’individus dans le premier bassin. »
Un foyer déjà détecté en 2019 en Haute-Garonne
Pour rappel, un premier foyer de Xénope Lisse avait été détecté en 2019 en Haute-Garonne. Environ 40 individus avaient été observés au printemps dans un bassin de rétention d’eaux pluviales. Puis au cours de plusieurs opérations, ce sont des dizaines d’amphibiens qui avaient été capturés, puis éliminés.
Pour l’heure, le conservatoire d’espaces naturels d’Occitanie considère que cette espèce exotique en est « aux premiers stades du processus d’invasion en Occitanie avec des impacts faibles à modérés ou espèce avec des populations localisées et des impacts faibles ».
Arrêté préfectoral jusqu’en 2026
L’arrêté préfectoral autorise ces opérations pour prévenir toute invasion à Toulouse jusqu’en 2026.
Actuellement, la présence de cette espèce est avérée dans le Nord-Ouest de la France, précisément dans les départements des Deux-Sèvres, dans la Vienne et en Maine-et-Loire.