À Toulouse comme ailleurs, le Pari Mutuel Urbain (PMU), lieu de socialisation sans barrière, incarne une « deuxième famille » pour les habitués. Derrière le comptoir, le taulier régule, écoute et s’adapte face aux défis d’un modèle en mutation.
Dans certains quartiers comme à la Faourette à Toulouse, le PMU est plus qu’un bar à paris hippiques : c’est un repère, un lieu où les solitudes se rencontrent autour d’un café ou d’un ticket de jeu. « C’est un lieu de convivialité où je vais faire mes courses, boire mon café », explique Isabelle Gousmar, maire de Montjoire près de Toulouse.
Le PMU comme centre de socialisation
D’après la sociologue Mirabelle Barbier, le PMU est une institution de socialisation, dépourvue de « barrières financières et symboliques », comme elle le développe dans « Microcomptoirs. Enquête sociologique sur la France des PMU », publiée par la fondation Jean-Jaurès, à laquelle elle a participé.
Fréquenté surtout par des hommes, le PMU est d’abord un espace de discussions. « C’est le canal privilégié pour glaner des informations et échanger des services, d’après la sociologue, c’est un espace où l’on met à distance tous les sujets qui créent des conflits, comme la politique. » Il est donc fréquent que les clients « s’autocensurent, parce qu’on ne sait pas ce que pense le voisin » précise-t-elle. Le PMU crée aussi un sentiment de camaraderie, qui s’illustre par une « solidarité de comptoir et la culture des petits gestes. » « On paye un verre ou un ticket à celui qui est en difficulté », explique la sociologue.
Une « deuxième famille »
L’établissement devient ainsi un « espace de détente, un moment à soi, où l’on vient oublier les tracas du quotidien », selon la chercheuse. Cette convivialité, recherchée par les tauliers et les clients, fait du PMU un « lieu d’accueil des solitudes et d’intégration, pour les personnes socialement isolées », souvent issues des classes populaires, de l’immigration, au chômage ou bien à la retraite. Le PMU apparaît ainsi tel un « point de repère, qui permet de s’intégrer assez facilement dans la vie d’un quartier ou d’un territoire. »
Le taulier est la figure de proue du PMU. Il est d’abord un « régulateur des comportements » : c’est lui qui impose la politesse et tempère certains débats. Il est aussi un « confident » pour certains turfistes. « Les clients se sollicitent peu entre eux mais sollicitent le taulier quand ils ont un problème personnel », explique Mirabelle Barbier. Le taulier est ainsi la figure de cette « deuxième famille », qu’est le PMU pour certains clients, selon la sociologue.
Quel avenir pour les PMU ?
« L’activité PMU n’est pas toujours rentable » explique-t-elle. Dès le 15 du mois, les clients réguliers consomment moins. Cela pousse les tauliers à diversifier leurs activités, notamment en draguant une clientèle féminine. « Ils organisent des soirées karaokés, des grandes terrasses, voire même séparent les activités bar et turf, pour que les femmes puissent venir entre copines. »
D’autres établissements organisent des évènements en rapport avec le terroir. « En Bourgogne, ils se la jouent sommeliers, dans le Calvados, ils proposent des bons plans coquilles Saint-Jacques », explique Mirabelle Barbier. Mais aussi, certains PMU deviennent des épiceries, comme à Montjoire. « Les tauliers travaillent avec les producteurs locaux », explique la maire Isabelle Gousmar. Un véritable poumon pour l’économie locale, pour lequel « on se battra », s’il venait à fermer affirme la maire haut-garonnaise.