Retour aux sources. Le hasard a parfois des allures de logique. Après un quart de siècle passé à l’autre bout du monde, Laurence Delpy revient là où tout a commencé : Toulouse.
Je reviens à Toulouse après avoir démarré à Toulouse », déclare la nouvelle dirigeante de Kinéis, à la rédaction.
Une boucle qui se ferme dans la ville où elle a étudié, et a été diplômée de commerce. Par la suite, elle s’oriente vers les télécoms, alors que le secteur est en pleine ébullition. Ce choix déterminant lui ouvre, presque de façon fortuite, les portes de l’international.
© Adélaïde Maisonabe – Nuukphotographies
Un destin façonné par l’Asie
C’est sur le continent asiatique que sa carrière prend son essor, où elle y pose ses valises dans les années 1990 :
Je suis partie en Asie où j’ai passé 25 ans de carrière », raconte-t-elle.
Singapour, Indonésie, Australie, Chine, puis retour à Singapour avant de regagner l’Europe : Laurence Delpy évolue dans un environnement en perpétuelle transformation.
L’Asie m’a offert beaucoup, beaucoup d’opportunités. »
Loin de l’expatriation classique, elle s’imprègne des réalités locales. Des économies ultramodernes comme le Japon, à celles en pleine transition comme l’Indonésie ou les Philippines, elle observe, de l’intérieur, une accélération fulgurante des usages numériques. Ce qu’elle décrit comme un développement de la haute technologie « extrêmement diverse » continue d’alimenter sa curiosité et son énergie.
Son ascension vers des fonctions de direction, notamment comme vice-présidente Mobile Networks chez Nokia, s’est construite « progressivement, en saisissant les opportunités ». En plus de sa capacité à saisir les occasions, Laurence Delpy fait preuve de lucidité sur les barrières culturelles, en particulier pour les femmes.
Souvent, le syndrome de l’imposteur nous fait croire qu’on n’a pas toutes les compétences. Moi, je pense que j’ai su saisir les occasions », souligne-t-elle.
Mais derrière la dirigeante se trouve une femme engagée dans l’équilibre : vie professionnelle, vie personnelle, même combat. Elle évoque sa famille, ses deux garçons, et une vision du management fondée sur l’humain :
Manager des gens, c’est aussi développer ce qu’on a en nous en termes d’humanité. »
Une approche presque holistique du leadership forgée au fil de ses nombreuses et riches expériences.
Kinéis : au croisement du spatial et de l’IoT
Le lien avec Kinéis lui apparaît aujourd’hui évident.
C’est la parfaite intersection entre les 20 ans que j’ai passés dans les télécoms et mes dernières années chez Eutelsat », décrit-elle.
L’entreprise toulousaine a déployé une constellation satellitaire 100 % française, dédiée à l’Internet des objets (IoT). Sa mission : connecter les objets hors de portées des réseaux terrestres. Après près d’un an passé à la mise en orbite de 25 satellites, l’entreprise s’apprête désormais à ouvrir ses services commerciaux, le 1er juin prochain. Et c’est pour cette étape stratégique et cruciale que Laurence Delpy arrive aux commandes, apportant avec elle sa méthode et son enthousiasme.
Donc, en ce moment, on est en train de terminer la mise à poste des satellites, de tester les performances de la constellation avec des objets chez des premiers clients qui sont connectés au réseau », explique-t-elle.
Kinéis étant pionnière à l’échelle mondiale dans le déploiement d’une constellation entière dédiée à l’IoT, tout (ou presque) doit être construit, à partir de zéro.
Il ne faut pas oublier que le territoire est un peu vierge. Donc, le développement commercial de solutions nouvelles est aussi un processus, on va dire, progressif. Parce qu’il faut identifier les cas d’usage », précise la CEO.
Avec son regard international, Laurence Delpy salue l’environnement français, qui a favorisé l’ascension rapide de Kinéis au poste de première entreprise de connectivité IoT.
Je trouve qu’on a un cadre de travail unique et performant. »
L’avenir en orbite
Toujours aussi engagée et enthousiaste qu’à ses débuts il y a 25 ans, Laurence Delpy aborde ce nouveau chapitre avec une profonde satisfaction : celle de « pouvoir apporter [son] expérience à cette équipe ».
L’entreprise toulousaine regroupe 60 salariés et 200 personnes mobilisées en Occitanie. © Adélaïde Maisonabe – Nuukphotographies
Chez Kinéis, cette étape marque le début d’une ère nouvelle, portée par une ambition renforcée : devenir la référence mondiale de la connectivité satellitaire pour l’IoT. Pour sa dirigeante, cette mission s’impose comme une évidence. Prête et résolue, elle se dit déterminée à prolonger (et amplifier) la liste des succès déjà accomplis.
Je considère que c’est un cadeau… et qu’il faut honorer pleinement tout le travail accompli pour en arriver là », confie-t-elle.
Quant à la pression que pourrait faire peser un tel enjeu, Laurence Delpy balaie la question naturellement : « Transformer le stress en motivation », voilà sa devise pour hisser Kinéis encore plus haut… jusqu’au-delà des étoiles.
>> À LIRE AUSSI : Rendre la Science plus inclusive, le combat de la chercheuse toulousaine Julie Batut