Un air plus pur, mais pas encore sain pour tous. La qualité de l’air en Occitanie s’améliore, c’est indéniable. Le dernier bilan annuel publié par Atmo Occitanie, l’observatoire régional de l’air, révèle une diminution des concentrations des principaux polluants atmosphériques et des gaz à effet de serre. Pourtant, le rapport met aussi en lumière une réalité plus nuancée : une part non négligeable de la population reste exposée à des niveaux de pollution supérieurs aux normes, qu’il s’agisse des seuils français, européens ou des valeurs guides plus strictes de l’OMS.
Des valeurs limites abaissées pour protéger la santé
En 2024, l’Union européenne a adopté une nouvelle directive sur la qualité de l’air, avec des valeurs limites significativement abaissées à respecter dès 2030. En parallèle, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande depuis 2021 des seuils encore plus stricts. Ces nouvelles références ont conduit à repenser l’évaluation de la pollution :
Le dispositif de surveillance actuel doit être renforcé. Une évaluation plus fine des concentrations et de l’exposition de la population est attendue », souligne Atmo Occitanie.
Afin de répondre à ces enjeux, l’observatoire occitan a développé une modélisation haute définition régionale. Elle permet d’identifier les zones à risques, même en dehors des grandes agglomérations. Des stations supplémentaires ont aussi été installées dans des zones jusque-là peu équipées.
Une pollution aux particules qui reste problématique
La situation reste préoccupante pour les particules en suspension (PM10) et les particules fines (PM2.5). Ces dernières proviennent principalement du chauffage au bois (à hauteur de 60 % pour les PM2.5) et voient leurs concentrations varier selon les conditions météorologiques.
En 2024, « moins de 1 % des habitants sont exposés à des concentrations supérieures à l’objectif de qualité en vigueur » pour les PM10 selon les seuils français. Mais ce chiffre grimpe entre 20 % et 41 % si l’on considère la directive européenne de 2024 pour les PM2.5. En chiffres, cela représente entre 1,2 et 2,4 millions de personnes en Occitanie. Ces niveaux sont atteints dès que les hivers sont froids, les émissions augmentant avec l’utilisation du chauffage.
Dioxyde d’azote : encore trop élevé près des routes
Polluant emblématique du trafic routier, le dioxyde d’azote (NO2) montre lui aussi des résultats contrastés. En air ambiant, les seuils réglementaires sont globalement respectés, y compris ceux fixés pour 2030. Mais en proximité du trafic, la situation est bien différente.
Des dépassements de la future valeur limite de 20 μg/m³ sont déjà observés dans toutes les agglomérations étudiées (Toulouse, Montpellier, Nîmes et Perpignan). Les plans de protection de l’atmosphère (PPA) ont certes produit des effets : à Toulouse, par exemple, la mortalité attribuable aux particules fines a baissé de 54 % entre 2009 et 2019. Mais pour Atmo, le combat n’est pas terminé :
La valeur limite 2030 est dépassée dans tous les environnements trafic de ces agglomérations et pourrait l’être sur de nombreux autres secteurs d’Occitanie, même à l’écart des zones densément urbanisées. »
PPA de l’agglomération toulousaine. © Atmo Occitanie
Ozone : 76 % des habitants exposés à un dépassement
Si les conditions météo de l’été 2024, plus frais et moins ensoleillé, ont réduit les pics d’ozone, le constat reste sévère. L’objectif de qualité pour la protection de la santé n’est toujours pas atteint :
La part de la population régionale concernée par un dépassement de cette valeur est estimée à 76 %. »
L’ozone, formé sous l’effet du rayonnement solaire à partir de polluants précurseurs, reste un enjeu majeur.
Le changement climatique qui va induire une hausse des températures devrait aussi favoriser la hausse des concentrations d’ozone. »
Baisse des émissions en 2022 : une tendance encourageante
Bonne nouvelle toutefois du côté des émissions. L’année 2022, marquée par un hiver doux et une crise énergétique, a vu une baisse significative de la consommation d’énergie en Occitanie. Résultat : une réduction des émissions de gaz à effet de serre et de polluants réglementés, à des niveaux inférieurs à ceux de 2019.
C’est aussi en 2022 qu’Atmo Occitanie a intégré une nouvelle méthode de calcul prenant en compte les particules dites condensables. Résultat : une réévaluation à la hausse des émissions de PM2.5 (+40 %) et PM10 (+30 %) sur cinq ans. Une évolution qui souligne par ailleurs l’importance d’adapter les outils de mesure aux progrès scientifiques.
Des outils pour mieux piloter les politiques publiques
Pour aider les collectivités à cibler leurs actions, Atmo Occitanie a mis au point deux nouveaux outils cartographiques : la Carte Impact Sanitaire (CIS) et la Carte Stratégique Air (CSA). Ces cartes permettent de visualiser l’exposition des habitants à la pollution, à l’échelle urbaine et sur trois polluants : NO2, PM10, PM2.5. « Chaque carte offre un état des lieux par année et par polluant », explique l’observatoire. Utilisables par les collectivités comme les habitants, elles serviront aussi à orienter les plans locaux d’urbanisme ou les achats immobiliers.
Carte Impact Sanitaire – NO2 – Toulouse Métropole. © Atmo Occitanie
Aussi, l’organisme régional devrait déployer prochainement de nouveaux « super sites », prévus par la norme européenne, afin d' »améliorer nos connaissances sur la pollution de fond » et de renforcer la modélisation. Deux sites de ce type existent déjà en Occitanie : à Toulouse (super site urbain de Mazades) et à Peyrusse-Vieille dans le Gers (super site rural).
Pollens, pesticides, perturbateurs : de nouveaux défis à relever
Au-delà des polluants classiques, Atmo Occitanie étend sa surveillance à de nouvelles menaces : pesticides, perturbateurs endocriniens, PFAS, carbone suie, particules ultrafines… En 2025, l’observatoire a aussi lancé une prévision régionale « pollens », afin de limiter le risque allergique. Accessible en ligne, elle vient compléter les données de qualité de l’air quotidiennement diffusées.
Un air meilleur, mais encore trop d’Occitans concernés
Ainsi, si la qualité de l’air s’améliore en Occitanie, les défis restent nombreux. La nouvelle réglementation européenne impose une accélération des efforts. Le mot d’ordre d’Atmo Occitanie pour les années à venir est clair :
Ensemble nous poursuivrons avec volontarisme nos travaux pour un air pur », affirme Émilie Dalix, présidente de l’organisme.
Parce que derrière les courbes et les pourcentages, ce sont des questions de santé publique qui se jouent.
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