À première vue, rien ne distingue le Sans Faim des autres restaurants. Dans cette grande salle qui accueille une poignée de tables, la déco se veut minimaliste (un joli tableau aux couleurs de Toulouse vient quand même égayer les murs aux peintures grises et blanches). Le menu ? Servi uniquement le midi, deux jours par semaine et sur réservation, dans une formule aux figures imposées : une entrée, un plat, un dessert.
Un menu en langue des signes
Le tarif ? 14 euros. Rarement vu prix aussi compétitif. Mais l’essentiel est ailleurs. À peine assis, un jeune garçon au sourire appliqué s’avance face à moi. Il vient me présenter les plats proposés ce midi-là. À ses côtés, l’une de ses collègues traduit ses mots en langue des signes. Le geste est sûr, et les présentations sont faites : nous sommes ici au CESDDA, le Centre d’Éducation Spécialisée pour Dysphasiques et Déficients Auditifs, situé rue des Trente-Six-Ponts dans le quartier du Busca. Et ce restaurant pas comme les autres, c’est celui qui participe à l’apprentissage préprofessionnel des jeunes du centre, tous atteints de troubles sévères de la parole ou de l’audition.

Tartare de tomate et agneau confit
Des adolescents (pour la plupart) qui assurent service et cuisine, sous l’œil bienveillant de leurs deux encadrants, Bertrand et Carla. Jamais loin d’eux. Et toujours près du cœur. Un dévouement total pour leur permettre de trouver une place dans un monde qui trop souvent, leur refuse. Ici, ils apprennent à travailler en équipe, à (se) faire confiance. À dépasser leur handicap pour croire pleinement en leurs capacités. Réelles et nombreuses.
Il n’y a qu’à voir le soin apporté aux assiettes, magnifiquement dressées, et pleines de vitalité. Que des produits de saison, travaillés de façon remarquable et piochés dès que possible, dans le terroir local. Des premières tomates, ils en font un tartare à la fraîcheur réjouissante, quand la mozzarella passée dans un siphon vient apporter le parfait crémeux à cette entrée maîtrisée. L’épaule d’agneau confite ? Divinement fondante, et servie avec une polenta parfaite et quelques asperges aussi vertes que croquantes. En dessert, la crème brûlée à la vanille aura passé sans encombre le seul test qui vaille : celui de ma cuillère, venue casser d’un coup sec la belle croûte formée sur le dessus. Comme un plaisir d’enfance retrouvée, grâce au talent évident de ces apprenants qui n’ont pas fini de surprendre.

Le Sans Faim, 27 rue des Trente-Six- Ponts