La Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Toulouse a vu le nombre de fraudes considérablement augmenter en 2024. Elles concernent tout autant les assurés que les professionnels de santé. Dans le collimateur : les audioprothésistes et les bandes organisées délivrant des kits d’arrêt de travail falsifiés sur les réseaux sociaux.
Les fraudes à la sécurité sociale se multiplient en Haute-Garonne comme dans le reste de la France. Elles concernent aussi bien les assurés que les professionnels de santé. La CPAM multiplie les contrôles.
Fausses prescriptions, surfacturations, soins fictifs, faux arrêts de travail, le service antifraude de la CPAM de la Haute Garonne ne chôme pas pour détecter la moindre anomalie. Signalements, regroupements de fichiers et de statistiques, rien n’est laissé au hasard, tout est scruté en amont. L’an dernier, 12 millions € de fraudes ont été repérées et stoppées à Toulouse. « J’emploie le terme de fraudes détectées et stoppés, car nous avons dans notre stratégie, l’objectif est d’éviter que le préjudice ne soit imputable à l’assurance maladie, déclare Isabelle Comte la directrice de la CPAM 31. Sur les 12M€, on a 4,6M€ de fraudes (+ 25% en un an) qui ont été identifiées avant même le paiement par l’assurance maladie. »
En 2023, le montant s’élevait à 9,41 M€. Ces fraudes concernent aussi bien les assurés que les professionnels de santé. En nombre, une forte majorité émane des assurés mais en termes de montant, le volet « assurés » représente moins de 20 % car l’impact financier émanant des assurés est proportionnellement inférieur aux autres fraudes des professionnels de santé. Pour cette dernière catégorie, c’est 72% du montant total des fraudes.
Ces fraudes sont détectées soit grâce à des signalements extérieurs soit à partir de bases de données. « On a des outils statistiques qui nous permettent de croiser l’intégralité des prestations qu’on paie, déclare Yves Loubère, responsable du service fraude CPAM 31. À partir de là, on peut déterminer des profils de professionnels de santé qui abuseraient ou qui seraient en surfacturation sur des majorations de nuit. Parfois on a des recompositions de journées qui font qu’on retrouve des journées supérieures à 24h. Ce sont des points d’entrées qui permettent de lancer des investigations et de déterminer des faisceaux de fraudes. »
Lutte contre les #fraudes | Une forte progression des fraudes détectées et stoppées par l’Assurance Maladie grâce :✅ à l’intensification des opérations de surveillance✅au renforcement des moyens humains et technologiques✅ une fermeté croissante face aux fraudeurs
— Assurance Maladie (@Assur_Maladie) March 20, 2025
Est-ce l’effet de la réforme 100% santé concernant l’auditif ? Des réseaux se sont organisés pour créer des fausses sociétés d’audioprothèses en transmettant des faux diplômes, des fausses validations. Via le numérique, il y a eu des récupérations de données des assurés dans les hôpitaux par exemple. Ces listes d’assurés circulent. Des personnes mal intentionnées récupèrent ces éléments-là et en profitent pour facturer. La CPAM peut être amenée à contacter l’assuré pour vérifier la délivrance de la prothèse. Mieux armés et mieux équipés, les enquêteurs de la CPAM font de plus en plus face à des fraudes liées au numérique.
Il y a notamment une recrudescence des faux arrêts de travail. Objectif : détourner de l’argent public. Près de 430 000€ l’an dernier. « Aujourd’hui on a des bandes organisées qui vendent sur les réseaux sociaux, sur le dark web, des kits clés en main d’arrêt de travail falsifiés, déclare Isabelle Comte, directrice de la CPAM 31. Nous avons mis en œuvre un certain nombre de dispositifs pour agir contre ces manœuvres frauduleuses. »
Contrôles renforcés, déconventionnement, radiations, amendes : le service antifraude dispose de sanctions et de moyens.
Face à ces nouveaux systèmes, la CPAM de la Haute-Garonne tente de s’adapter pour détecter la fraude, si possible avant le paiement des prestations.
À Toulouse, ce service est composé d’une unité d’investigation avec 16 agents dont la moitié est assermentée, ce qui leur permet d’aller sur le terrain.
Une équipe de juristes gère ensuite les contentieux en aval des actions menées. Deux managers pilotent le service. « Ici c’est une équipe d’investigateurs qui investiguent sur dossiers d’assurés, professionnels de santé, employeurs ou établissements, poursuit Yves Loubère, responsable du service fraude à la caisse primaire de Toulouse. Après ces premiers éléments, on les conforte en passant sur le terrain. On peut interroger des professionnels de santé pour s’assurer de la véracité de la prescription, un assuré pour la véracité de la réalisation d’un soin ou d’une prestation. »
En 2024 sur la Haute-Garonne, il y a eu 400 procédures contentieuses contre 151 en 2023. Il existe tout un arsenal pour combattre ce fléau. « 12M€ c’est évidemment un risque majeur pour la préservation de notre système de santé, conclut la directrice Isabelle Comte. Nous avons tout un arsenal de stratégie contentieuse. »
Dans le hall d’accueil, la CPAM de Toulouse affiche les noms de 2 professionnels toulousains frappés d’interdiction d’exercer.
Écrit avec le reportage de France 3 Occitanie : Stéphane Compan et Frédéric Desse.
https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse