Sur grand écran cette semaine, trois films forts questionnent nos identités et nos héritages : « Mexico 86 », « La chambre de Mariana » et « Simon de la montaña ». Cette sélection cinéma explore la mémoire, le handicap et les choix déchirants liés à l’exil.
Chaque mercredi, un directeur de salle de Toulouse ou de son agglomération nous donne sa sélection de films. Cette semaine, Pascal Recalde du cinéma Utopia Tournefeuille, nous livre ses choix sur les sorties de ce mercredi 23 avril.
« Pourchassée par la junte guatémaltèque, réfugiée sous une autre identité au Mexique, Maria a dû laisser au Guatémala son enfant à sa mère. Mais un jour, sa mère étant gravement malade, elle doit le récupérer… Avec « Mexico 86 », réalisé à partir de sa propre histoire et comme dans son premier film « Nuestras Madres », César Diaz analyse l’impact de la dictature sur les familles guatémaltèques, en adoptant ici une perspective plus personnelle et émotionnelle qui allie habilement drame familial et haletant thriller politique. Jusqu’à quel point l’amour maternel peut-il pousser à remettre en question son engagement dans l’intense révolution ? Bérénice Bejo, qui joue là dans sa langue maternelle (ce qui est rare !), incarne avec finesse le conflit intérieur de cette mère partagée entre lutte politique et sacrifice personnel. »
« 1943, Ukraine. Pour sauver son fils Hugo, 12 ans, de la déportation, sa mère le confie à Mariana, son amie d’enfance, une prostituée qui vit dans une maison close. Caché dans le placard de la chambre de Mariana, l’existence du garçon est suspendue aux bruits qu’il entend à travers la cloison… Réalisé d’après le roman éponyme de Aharon Appelfeld, le film signe la troisième collaboration entre Mélanie Thierry et le réalisateur Emmanuel Finkiel, après « Je ne suis pas un salaud » et La douleur », dans lequel l’actrice incarnait magnifiquement Marguerite Duras.
« La Chambre de Mariana » pourrait être l’ultime volet d’un triptyque autour de la Shoah, ainsi que l’explique Emmanuel Finkiel : « Dans « Voyages », je filmais des gens d’aujourd’hui hantés par le passé dont il n’existait plus que des traces. Pour « La douleur », j’ai plongé dans le passé, mais je me suis placé du côté de celle qui attend, qui est extérieure au cercle concentrationnaire et au processus de destruction. Et là, avec « La Chambre de Mariana », je suis non seulement retourné vers cette époque, mais je suis allé au front, au cœur de ce processus ».
« Simón a 21 ans et vit en Argentine. Depuis peu, il fréquente une nouvelle bande d’amis. Auprès d’eux, pour la première fois, il a le sentiment d’être lui-même. Mais son entourage s’inquiète et ne le reconnaît plus… » Simon de la montagne », de l’Argentin Frederico Luis, est une œuvre lumineuse et intelligente qui joue avec les frontières de ce que signifie se définir ou pas comme une personne en situation de handicap.
Le film, Grand Prix de la Semaine de la Critique à Cannes, est une expérience sensorielle sur ce que l’autre ressent et l’empathie que l’on peut avoir face à la différence. La performance de son acteur principal, Lorenzo Ferro, nous tient en haleine, car son ambiguïté nous plonge davantage sur nos propres craintes et tabous et nous ouvre la porte sur une autre représentation du handicap au cinéma… Frederico Luis lui-même a du mal à définir le genre de son film qui selon lui « explore la notion de capacité humaine : qu’est-ce qu’une personne est capable de faire ou pas ? »