Les liens sont parfois étroits entre les opposants à la Ligne à grande vitesse Toulouse-Bordeaux et les collectifs qui militent actuellement pour la création d’un statut juridique du fleuve Garonne. C’est le cas de Sepanso Gironde, la Fondation Danielle Mitterrand, Wild Legal et des élus bordelais. Une manière de « politiser » le débat face aux grands projets routiers ou ferroviaires ?
Les « amies et amis de la nature », à qui s’adresse le collectif Wild Legal, qui a lancé, le 14 septembre 2023, une pétition (plus de 25 000 signatures) pour « protéger les droits du fleuve Garonne », sont peu à peu devenus le poil à gratter des grands projets routiers et ferroviaires du Sud-Ouest. Et les liens sont parfois étroits entre les opposants à la Ligne à grande vitesse Toulouse-Bordeaux et les collectifs qui militent actuellement pour la création d’un statut juridique du fleuve Garonne. C’est le cas de Sepanso Gironde, la Fondation Danielle Mitterrand, Wild Legal et des élus bordelais signataires de la pétition.
Multiplier les actions sur plusieurs tableaux
La récente décision du tribunal administratif de Toulouse, le 27 février dernier, d’annuler le projet autoroutier (A69 entre Toulouse et Castres) « faute de nécessité impérieuse à le réaliser » incite de nombreux collectifs à multiplier les actions le long de la Garonne et du projet de Ligne à grande vitesse, la LGV entre Toulouse et Bordeaux, dont les travaux ont commencé en Haute-Garonne, au nord de Toulouse. Ils sont régulièrement pris pour cible par ces citoyens engagés, organisés en collectif, menant une bataille sur différents tableaux : écologique, politique et juridique. Dernier épisode en date, l’instruction du recours déposé l’an dernier par quatre associations environnementales contre le tracé de la LGV s’est terminée la semaine dernière.
« On va vivre de quoi si on doit tout supprimer ? »
Ce qui exaspère le président du Conseil économique, social et environnemental régional (Ceser) Jean-Louis Chauzy, fervent défenseur de la LGV, une Arlésienne espérée depuis plus de 20 ans en Occitanie et attendue pour 2032 afin de permettre aux voyageurs de rejoindre Paris en 3 h 10. « On est confronté à plusieurs mouvements de radicalisation, d’organisations politiques, qui s’opposent à de grands projets, depuis le renoncement de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, explique-t-il. Que ce soit pour le stockage de l’eau, les infrastructures routières, ferroviaires, le fret, qui prennent en compte la question du développement durable. 82 % des mobilités se font encore par la route. On va vivre de quoi si on doit tout supprimer ? ».
« Le triangle de la LGV… dans une Arche de Noé de la biodiversité »
Les actions d’ordre environnemental et politique sont totalement assumées par les collectifs des amis de la nature, à la fois pour les droits de la Garonne et contre les travaux gigantesques d’une ligne à grande vitesse. « Le statut juridique du fleuve Garonne et la LGV sont deux sujets indépendants. La vallée du Ciron en Gironde est, à ce titre, un sujet intéressant, documenté, c’est une Arche de Noé de biodiversité. C’est là que va se trouver le triangle ferroviaire de la LGV, le croisement où la ligne se sépare entre Toulouse et Bayonne. En plein dans des zones humides, elle va couper tous les affluents de la rive gauche du Ciron, il y a beaucoup de problèmes, notamment la modification du microclimat local », explique Alexis Ducousso, membre de la commission forêt à la Sepanso Gironde dont le combat contre la LGV est ancien.
« Le combat est politique et démocratique »
Le droit de l’environnement est au cœur du débat, affirme Marine Calmet, avocate et présidente de l’association Wild Legal. « Ces combats contre ces grands projets sont aujourd’hui révélateurs, à la fois des lacunes du droit de l’environnement existant. La prise en considération de la nature est biaisée par les intérêts prioritaires donnés au développement économique et à un modèle traditionnel d’aménagement des espaces, constate-t-elle. Dans cette logique, la protection de l’environnement reste trop accessoire. »
À Wild Legal, le « combat est politique et démocratique, car il doit permettre une meilleure prise de décision collective », affirme Marine Calmet qui veut rappeler que « le mouvement des droits de la nature est bien plus qu’une lubie de juristes : il s’agit d’un changement transformatif à l’échelle de nos institutions qui s’adresse aux enjeux du XXIe siècle ».