Fraude bancaire : 208 000 € dérobés au Stade Toulousain via un faux ordre de virement. Une enquête judiciaire menée entre Toulouse, Paris et Israël a conduit à l’arrestation de neuf suspects.
C’est une nouvelle qui pourrait redonner le sourire au Stade Toulousain. Des escrocs, suspectés d’avoir dérobé 208 000 € au club, viennent d’être arrêtés à l’issue d’une enquête de grande ampleur. Les investigations de la police judiciaire ont conduit jusqu’en Israël. Neuf personnes ont été interpellées depuis ce lundi par la division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS) de Toulouse et l’Office anti-cybercriminalité (OFAC) de Paris, pour un préjudice global estimé à plus de 14,4 millions d’euros.

Le mail d’un pro du bâtiment piraté
L’affaire prend forme durant l’été 2023. En août, le club Rouge et Noir reçoit un courrier électronique provenant d’un fournisseur habituel, une entreprise du bâtiment de Haute-Garonne. Dans ce message, la société annonce un changement de compte bancaire pour les prochains règlements. Le service financier du club ne détecte pas la supercherie et procède aux paiements. Quelques semaines plus tard, un autre interlocuteur du fournisseur alerte sur des impayés.
Le Stade Toulousain découvre alors qu’il est victime d’une fraude et que 208 000 € ont été versés à des arnaqueurs se faisant passer pour son prestataire.
D’après nos informations, c’est la boîte mail de ces pros du bâtiment qui a été piratée par des hackers afin de vider les comptes du Stade Toulousain. Mais le club d’Antoine Dupont a décidé d’assumer seul les conséquences financières, estimant que les 208 000 € dérobés seraient trop impactants pour ce partenaire local et entraînerait la fin de leur activité.
Un faux Didier Lacroix
La semaine suivante les escrocs poursuivent leur tentative en envoyant d’autres courriels, usurpant cette fois l’identité de Didier Lacroix, président du club, pour demander des virements. La tentative échoue, l’équipe – forte de son expérience – appelle un numéro présent en en-tête du mail et identifie la supercherie.
L’enquête de la police judiciaire de Toulouse s’est déroulée sous l’autorité d’un juge déterminé et très impliqué de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Bordeaux. Très rapidement, Europol s’intéresse aussi à cette affaire, qui révèle des ramifications internationales.
Les premiers éléments recueillis par les enquêteurs les mènent jusqu’en Israël. Une dizaine de fraudeurs multiplient les arnaques lucratives grâce à de faux ordres de virement. La lenteur de l’enquête, en raison du conflit israelo-palestinien, freine les procédures judiciaires et suscite une vive frustration au sein des équipes chargées de l’affaire.
En surveillant les suspects, les forces de l’ordre assistent en temps réel à de nombreuses tentatives d’extorsion visant hôpitaux, entreprises et associations sportives. Face à cette impuissance temporaire, les policiers prennent les devants : ils préviennent des cibles potentielles pour éviter qu’elles ne soient piégées. Ce réflexe aurait permis d’éviter jusqu’à 20 millions d’euros de préjudices supplémentaires.
Le coup de filet a finalement eu lieu ce lundi, en région parisienne et en Israël. Les faussaires avaient manifestement mis en place une véritable plateforme pour centraliser appels, courriels, et usurpations d’identité. Ce réseau structuré a fait des centaines de victimes, en Europe et en Amérique du Sud, pour un butin estimé à 15 millions d’euros.
Six hommes sont actuellement entendus à Tel-Aviv, trois autres à Paris, assistés par Mes Sébastien Ronphe et Gilles Bracka. À l’issue des auditions, des mises en examen ont eu lieu au parquet de Nanterre. Certains de ces individus seraient proches des personnes qui ont participé à l’escroquerie à la taxe Carbonne.
Au total, 121 victimes ont été identifiées dans au moins huit pays et pour un préjudice total estimé à 14,4 millions d’euros. Le groupe d’identification des avoirs criminels (GIAC) de Toulouse tente désormais de récupérer les fonds encore disponibles sur les comptes bancaires des suspects et de saisir leurs biens. Ils ont déjà mis la main sur 20 000 euros en espèce et un compte bancaire crédité de 248 000 €, ainsi qu’un véhicule et de matériel informatique. La tâche est rendue complexe par l’ingéniosité des escrocs, qui ont multiplié les sociétés fictives pour brouiller les pistes. Grâce à sa réactivité le Stade Toulousain a réussi à récupérer près de 70 000€. Mais la note reste salée. Le match pour être remboursé des 140 000€ euros restant ne fait que commencer.