Refuser de livrer son code secret aux gendarmes qui voulaient exploiter son téléphone portable dans une affaire de cambriolages en série, près de Toulouse, a failli lui coûter très cher. Le pire qu’un homme puisse imaginer. Instantané d’audience.
Leur pedigree ne témoigne pas en leur faveur. Rachid a 36 ans, des enfants, une femme enceinte de 8 mois et demi. Et aussi 9 mentions au casier. À ses côtés dans le box, Rafik, 39 ans, 24 mentions, peine à maintenir la station debout après un grave accident de la circulation en 2020, qui l’a laissé handicapé. Violences, trafic de stups, délits routiers, transport d’arme, vol… Depuis leur minorité, leur CV respectif recouvre un large panel des infractions réprimées par le Code pénal.
Tous deux sont « addicts au jeu » et comparaissent détenus. Ils nient la série de vols par effraction dont les soupçonnent les gendarmes, entre février et mars 2025 à Castelginest, Saint-Alban et au Vernet, en Haute-Garonne. Détail sordide : l’un de ces cambriolages aurait été commis… pendant des funérailles. Dépouiller la veuve dévastée. Moche.

Rachid veut être jugé ce jeudi 15 mai « parce que [il est] innocent ». Rafik sollicite un report. C’est son droit en comparution immédiate. Lorsque les forces de l’ordre sont venues l’appréhender, il a sauté du balcon du deuxième étage, malgré son handicap. « Quand ils sont arrivés, je dormais, je ne savais pas que c’étaient les flics », oppose-t-il. À la troisième mention en deux phrases du vocable péjoratif, la présidente recadre. « Vous voulez dire, les gendarmes… ».
La procureure est opposée à la disjonction. Leur destin judiciaire doit demeurer scellé. « Même s’ils les contestent, trois des quatre vols ont été commis en réunion », rappelle-t-elle. Elle réclame leur maintien en détention. D’autant que Rachid a refusé de dévoiler le code de son téléphone portable aux enquêteurs.
La corde sensible
« Il est prêt à vous le donner maintenant », s’empresse de préciser son avocate, Me Lucille Molton, qui fait vibrer la corde sensible. « Le renvoyer en prison jusqu’au procès, c’est le priver de la naissance de son fils. Peut-on priver un homme de cet événement-là pour des faits qu’il nie et pour lesquels il est présumé innocent ? ». Contrôle judiciaire pour Rachid, maintien en détention pour Rafik.
Depuis le box, le futur papa trace sur le téléphone que lui tend son avocate le fameux code en forme de symbole. Scène cocasse. « 1147 ». « Sûr ? ». Un ange passe. « 11447 ». « On note les deux ! », tranche la présidente. La Brigade de recherches passera récupérer l’objet à Seysses pour analyses. Rendez-vous fin juillet pour juger le fond du dossier. Au fond de la salle, une femme au ventre rebondi quitte le tribunal. Sans doute soulagée.