Les bouillons séduisent une clientèle variée. Ce phénomène culinaire, marqué par des prix serrés et un retour aux traditions, se développe hors de Paris. Pourquoi ce succès ? Explications avec Bernard Boutboul, le président de Gira, cabinet d’accompagnement en marketing, stratégie et développement spécialisé dans la restauration.
La Dépêche du Midi : Le bouillon est-il typiquement parisien ?
Bernard Boutboul : Jusqu’à il y a sept ou huit ans, le Bouillon Chartier était un cas isolé à Paris. Dans les guides touristiques, c’était d’ailleurs une attraction à visiter, au même titre que la Tour Eiffel ou l’Arc de Triomphe. Depuis, des jeunes sortis de grandes écoles ont ouvert de nouveaux bouillons, et Chartier a fait des émules. Mais il n’y en a qu’une poignée dans la capitale, sur les 180 en France. C’est une mode qui déferle davantage en région qu’à Paris. Des prix très bas, un beau cadre et des plats iconiques, c’est l’équation parfaite.
Pourquoi les bouillons se multiplient-ils maintenant ?
Le bouillon se développe au moment où le pouvoir d’achat diminue, y compris chez les CSP +. Les Français font partie des rares peuples du monde pour qui la sortie au restaurant reste un plaisir. Les nouvelles générations de consommateurs veulent une vraie expérience : manger des œufs mayo, une blanquette de veau, une saucisse-purée, avec le service à l’ancienne, l’addition griffonnée sur la nappe gaufrée… Il y a un côté retour à la tradition qui confère à l’ensemble un certain folklore.
Quelles sont les conditions requises pour bien faire tourner un bouillon ?
Il faut acheter les ingrédients au prix le plus bas possible. La deuxième exigence, c’est de faire de très gros volumes. Chartier, à Paris, assure entre 1000 et 1500 couverts par jour. Si ça tombe à 600, ils ferment. Le troisième paramètre, c’est la pérennité. Les fréquentations lors des ouvertures sont toujours très grosses. Quand on monte un bouillon, on crée un événement. Ce n’est qu’au bout de six mois qu’on atteint la vitesse de croisière. Et enfin il faut une équipe de salle ultra-performante, rapide et efficace. Quand on fait la queue 45 mn dehors, on n’a pas envie d’attendre son café une fois assis. Il faut donc recruter des bons professionnels, ça peut être un point faible pour certains établissements.
Quelle est la clientèle des bouillons ?
C’est absolument tout le monde ! On constate la présence des moins de 30-35 ans, la génération Z élargie, qui ont tendance à s’y rendre plutôt en bande. Pour eux, c’est une alternative à la restauration rapide haut de gamme, avec le côté iconique en plus. On peut d’ailleurs considérer les bouillons comme une concurrence indirecte des fast-foods.