Le dessinateur Pierre Samson vient de publier sa nouvelle BD, « Au bonheur des veuves », qui a obtenu le Gro’prix littéraire au dernier festival Fifigrot de Toulouse. Il sera en dédicace vendredi 23 mai à la librairie Bédéciné et jeudi 5 juin à la librairie Floury Frères. Un ouvrage sombre et furieusement libre.
Pour sûr, résumer 50 ans de galéjades et saillies drolatiques en quelques minutes relève de la gageure mais une chose est sûre pour le dessinateur Pierre Samson : « Dessiner, en tout cas produire des images et des textes, est une nécessité apparue très tôt, avec une ligne de conduite qui a consisté à ne rien prévoir et à laisser venir. Et, même si mon éducation catholique donnait la primeur à Dieu, je me suis dit qu’un peu de talent ne gâcherait rien au cas où il jouerait aux abonnés absents. Sauf que le talent, c’est quand même beaucoup de travail, surtout quand on part de rien et qu’il faut tout apprendre sur le tas. L’époque des années 70/80 était fort heureusement indulgente avec les tâtonnements. »
Les premiers dessins d’humour surgissent dès 1975 dans « La Dépêche du dimanche », sur le registre de l’humour graphique sans parole et de la veine absurde. Internet n’a pas encore pointé le bout de son nez et les collaborations avec la presse locale (la Confédération paysanne, le groupe Milan Presse) et nationale (« Hara-Kiri », « La Grosse Bertha », « Fluide Glacial », « Le Monde », « Libération », « VSD »…) se multiplient parallèlement à une aventure locale baptisée « Satiricon », qui durera onze ans à Toulouse. Des incursions dans le domaine de la communication, avec la ville de Saintes notamment, et de l’édition donneront vie à de premières publications consacrées à la musique, au climat entre autres.
Le retraité fait de la résistance
À 73 printemps, l’esprit vif et la plume alerte, Samson publiait voilà peu un nouvel album, « Au bonheur des veuves ». « C’est le fruit d’un travail qui a débuté à la mort de mon père, confie-t-il, et qui s’est poursuivi pour l’essentiel pendant quatre années, en hommage à son sens de la dérision. Pour autant, la mort est un thème que j’ai toujours traité et qui m’a toujours suivi. La drôlerie, ici, je l’ai voulue portée par un dessin faussement réaliste et des propos sans valeur humoristique propre. Un alliage du réel et de la banalité qui engendre ce dérapage qu’est l’humour, qui provoque le plaisir de la surprise et parfois, le rire. »
Et ce nouvel album ne se prive pas d’explorer avec bonheur les chemins de la noirceur absolue : « Au nom de quoi se priver de tout dire ? Il me semble essentiel, pourvu que l’on ait le goût d’aller où bon nous semble, peu importe le sujet. Tout est dans la manière de l’aborder. L’humour peut être délicat et côtoyer la poésie. » Et si la quête peut paraître fastidieuse, force est de constater que l’homme a atteint son objectif. La famille Groland ne s’y est pas trompée en couronnant, voilà quelques mois, ce nouvel album d’un Gro’prix littéraire.
Le retraité fait de la résistance puisque les projets ne manquent pas : « L’avenir étant toujours lointain et radieux, je m’emploie naturellement à le meubler du mieux que je peux. Depuis dix ans, je revisite l’histoire de la peinture, projet démesuré dont le destin est de rester inachevé ! Un recueil possible sur les paysans, thème qui a mobilisé une grande partie de ma vie ou un livre de cuisine loufoque… » Tous dorment depuis des années dans son ordinateur, un éditeur viendra-t-il les réveiller ?