Isolement prolongé, traitements suspendus, chambre verrouillée : à la Maison d’Accueil Spécialisée Concorde près de Toulouse, une plainte vise des faits graves. L’affaire pourrait relancer le débat sur les droits fondamentaux des personnes handicapées.
« Enfermer un gamin 20 heures par jour c’est normal ? » s’indigne son beau-père. Mathieu G., un adulte polyhandicapé de 25 ans atteint du syndrome CHARGE, aurait été enfermé de longues heures, chaque jour, dans sa chambre à la Maison d’Accueil Spécialisée (MAS) Concorde à Saint-Lys (Haute-Garonne). Sans cadre médical ni réglementaire. La justice devra trancher : une plainte vient en effet d’être déposée par l’avocat Me David Nabet-Martin au nom de sa famille. Les faits visés sont graves : « séquestration », « violences volontaires aggravées », « administration de substances nuisibles » et « conditions d’hébergement contraires à la dignité humaine ».
Des comportements interprétés comme des violences
Depuis son admission le 23 mai 2024, la famille de Mathieu s’inquiète de la prise en charge dans cette structure gérée par l’association APEIHSAT. Selon sa mère, les traitements médicaux auraient été modifiés sans autorisation. En particulier, ses antimigraineux qui n’auraient pas été administrés et un médicament prescrit par son neurologue aurait été refusé. Les parents en sont sûrs, ces modifications ont entraîné des troubles du comportement, que la MAS a interprétés comme des agressions, justifiant ainsi le placement récurrent du jeune handicapé en chambre. Porte verrouillée. Un soignant aurait confirmé cette pratique. Selon la famille, les « agrippements » de Mathieu – gestes utilisés pour signaler une douleur ou un inconfort – sont des « comportements langagiers » et ont été, à tort, caractérisés comme des actes de violence.
Ce placement en isolement aurait été répété et organisé sans l’encadrement requis par les règles de droit. Les proches de Mathieu affirment avoir découvert, lors d’une visite, que sa chambre avait été vidée, obscurcie et verrouillée, sans information préalable. Une ordonnance médicale antidatée et un protocole de contention auraient été produits a posteriori pour justifier ces conditions.
Isolement prolongé et dispositif controversé
Selon les documents en possession de la famille, ces pratiques se seraient poursuivies au moins jusqu’en mars 2025. Un dispositif récent, la mise en place d’une « tente sensorielle », fait également controverse : loin d’apaiser le jeune homme, il aurait renforcé son isolement. « On demande son retrait depuis 4 mois », précisent les plaignants.
La famille dénonce aussi des altérations et des refus de transmission de son dossier médical, l’absence de communication, ainsi que des tentatives répétées de faire exclure Mathieu de l’établissement. Une instance de la MDPH a d’ailleurs rejeté la demande d’exclusion. « La MAS sait qu’elle est hors la loi et veut s’en débarrasser », accuse-t-elle.

Des documents internes jugés discriminatoires
Dernier problème en date : des extraits du rapport d’activité 2024 de la MAS Concorde transmis à toutes les familles des résidents évoquent clairement la situation de Mathieu, de manière « discriminatoire ». « On a face à une MAS qui a fait des erreurs dès le début. Et au lieu de rectifier, elle s’est acharnée et a multiplié les comportements néfastes pour Mathieu. Et maintenant ils conflictualisent les rapports avec nous », analyse un proche.
La MAS Concorde applique-t-elle réellement les droits fondamentaux des personnes accueillies ? C’est ce que la justice devra déterminer. L’affaire est désormais entre les mains du parquet de Toulouse.