Une récente étude a été menée par des chercheurs de l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT) pour mieux comprendre les caractéristiques d’Escherichia coli chez les animaux, notamment la capacité de la bactérie à résister aux antibiotiques, sa dangerosité, et son potentiel à se transmettre à l’humain.
Il aura fallu trois ans de travaux à l’équipe de chercheurs de l’Institut de recherche en santé digestive (IRSD) à Toulouse pour mieux cerner les capacités de l’Escherichia coli, une bactérie bien connue qui provoque des infections urinaires, à résister aux antibiotiques. Surtout « sa dangerosité et son potentiel à se transmettre à l’humain », indique les scientifiques. À l’origine de ces recherches publiées dans la revue scientifique Veterinary Research, Nicolas Jousserand, docteur vétérinaire et enseignant-chercheur en médecine interne à l’Ecole nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT).
135 bactéries isolées à partir d’échantillons d’urine de chats et de chiens
L’expérience a été menée sur 135 bactéries E. coli isolées à partir d’échantillons d’urine provenant de 44 chats et 91 chiens suivis dans trois hôpitaux vétérinaires en France. Plus de 200 échantillons ont été isolés à partir d’échantillons humains prélevés au CHU de Purpan, confie Nicolas Jousserand. Il raconte la genèse de cette étude insolite.
« Les antibiotiques sont fréquemment utilisés… »
« Cette découverte était à l’origine de mes recherches, dit-il. L’infection urinaire est une problématique très importante, en médecine humaine ou animale. C’est un problème pour beaucoup de femmes, également en médecine vétérinaire, les chiennes. Les antibiotiques sont très fréquemment utilisés et on sait qu’il faut les utiliser avec beaucoup de précaution. La clef de voûte de cette étude était de faire de la médecine comparée entre l’humain et l’animal. »
« Les vétérinaires ont fait un énorme travail de prescription »
L’affaire n’était pas gagnée, d’autant que la bactérie Escherichia coli a une nature changeante et une résistance aux médicaments. « On a été agréablement surpris de voir que les bactéries des animaux sont très peu résistantes aux antibiotiques en France, mais pas en Espagne, Portugal et Italie. L’hypothèse est que la législation française, revue dans les années 2010-2011, a restreint l’utilisation des antibiotiques et que les vétérinaires ont fait un énorme travail de prescription. »
Des méningites chez les enfants
La particularité de la bactérie est sa diversité. « Certaines peuvent produire des gastro-entérites, des méningites chez les enfants et celles qu’on a dans le tube digestif qui sont inoffensives. Au final, quand on compare la génétique des différentes bactéries, un gros tiers a la même génétique sur un humain que sur un animal. L’étude est intéressante en ce sens, cela pose la question de la transmission de ces bactéries de l’animal à l’humain ou inversement. Pour le moment, ces données ne sont pas très explorées, mais notre étude apporte un élément supplémentaire. »
Comment l’Escherichia coli pourrait-elle se transmettre ? « On ne l’a pas démontré, mais selon certaines hypothèses, cela peut être dû à la proximité qu’on a avec nos animaux, nos chiens, nos chats, avec on partage notre assiette, qui dorment sur le lit… », confie Nicolas Jousserand.