Un signal d’alerte scientifique sur l’avenir de l’olivier. La production d’huile d’olive, symbole millénaire de la culture méditerranéenne, est en proie à des défis inédits. Une équipe internationale de chercheurs, coordonnée par David Kaniewski, maître de conférences à l’Université de Toulouse, met en lumière les menaces pesant sur l’oléiculture en Méditerranée orientale. Publiée le 6 avril dans Communications Earth & Environment, leur étude repose sur 8.000 ans de données, et révèle une tendance inquiétante : le déclin de la photosynthèse des oliviers, essentielle à la pollinisation, et donc, à la production.
Un double phénomène climatique et solaire
Deux facteurs principaux ont été identifiés par les scientifiques : les sécheresses récurrentes et la baisse de l’activité solaire. Cette dernière est marquée par un « grand solar minimum », une phase de plusieurs décennies où l’intensité des cycles solaires chute.
Ces grands minima solaires se produisent lorsque plusieurs cycles solaires présentent une activité inférieure à la moyenne », précise l’étude.
La conséquence directe est une réduction du bilan radiatif, c’est-à-dire de l’énergie reçue par la Terre. Celui-ci est pourtant crucial pour le développement des oliviers, notamment durant deux périodes clés : de mars à avril (bourgeonnement) et de septembre à novembre (maturation des olives).
Photosynthèse et pollinisation en déclin
L’étude souligne que la production de pollen, indicateur essentiel de la fertilité des arbres, est directement liée à l’activité photosynthétique, elle-même influencée par les températures, le CO2, les précipitations et, surtout, l’ensoleillement. David Kaniewski avertit :
Dès qu’il [le bilan radiatif] se retrouve modifié, il impacte négativement la floraison, la fécondation et la fructification des oliviers, agissant comme une importante couverture nuageuse limitant l’insolation. »
L’oléiculture syrienne, menacée par le changement climatique et les variations de l’activité solaire. © David Kaniewski
Une menace pour l’économie et l’identité méditerranéennes
Au-delà de l’impact environnemental, ce constat interroge la pérennité d’un pilier économique et culturel.
L’activité photosynthétique apparaît donc comme un déterminant clé concernant l’avenir de l’économie oléicole méditerranéenne », peut-on lire dans l’étude.
Avec l’Espagne en ligne de mire, premier producteur mondial, les scientifiques poursuivent leurs recherches afin de mieux comprendre la vulnérabilité régionale.
Selon l’Olive Oil World Congress, l’Espagne produit entre 30 et 40 % du volume total d’huile d’olive dans le monde, et entre 50 et 70 % du volume européen. Ici l’oliveraie de Ronda (Espagne). © KitijaAbele/Shutterstock
Vers de nouvelles stratégies d’adaptation
Cette recherche conjointe du Centre de recherche sur la biodiversité et l’environnement de Toulouse (CRBE, CNRS/IRD/Toulouse INP/Université de Toulouse), du laboratoire ThéMA et de l’ISEM, ouvre la voie à des stratégies d’adaptation pour préserver la filière. Dans un contexte de transition alimentaire et de valorisation du régime méditerranéen, « la question de la soutenabilité, voire de la pérennité de l’un de ses constituants majeurs face aux déterminants climatiques reste sans réponse« .
Un avenir incertain se profile alors pour l’oléiculture, entre variations célestes et changements terrestres.
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