Une reconnaissance nationale pour des réussites locales. C’est un joli coup de projecteur sur la recherche en Occitanie Ouest : le CNRS vient de dévoiler les noms de cinq lauréats de ses prestigieuses médailles, et ils sont tous rattachés à des laboratoires de la région. Bastien Gerby et Damien Texier décrochent la médaille de bronze 2025, consacrant leurs débuts déjà brillants dans la recherche. Quant à Marie-Charline Blatché, Juan Escobar Munoz et Émilie Lerigoleur Balsemin, ils reçoivent la médaille de cristal, saluant leur apport déterminant en tant que personnels d’appui à la recherche.
En attendant la remise officielle des distinctions, qui se tiendra le 18 novembre prochain à Toulouse, visite guidée de ce laboratoires où se réinvente le monde.
Bastien Gerby : contre la leucémie, des cellules souches à cibler
À tout juste 40 ans, Bastien Gerby s’attaque à l’un des grands défis de la médecine pédiatrique : la leucémie aiguë lymphoblastique B. Directeur de recherche au Centre de Recherches en Cancérologie de Toulouse (CRCT), il scrute les toutes premières étapes de la maladie. Objectif ? Mieux comprendre ces « cellules dormantes capables d’initier la leucémie chez l’enfant ».
Grâce à des modèles murins reproduisant fidèlement les phases de développement de la maladie, il cherche à percer les secrets de la résistance de ces cellules souches leucémiques aux traitements actuels. À la clé : des thérapies ciblées qui pourraient, un jour, changer le destin de milliers de jeunes patients.
Bastien Gerby est lauréat de la médaille de bronze CNRS en 2025. © CNRS/Mélina Le Corre
Damien Texier : des matériaux plus verts pour des industries plus légères
Autre médaille de bronze, autre terrain de jeu : celui des matériaux haute température. Damien Texier, chercheur à l’Institut Clément Ader (IMT Mines Albi), explore les limites de la micromécanique pour imaginer les composants de demain. Il le dit lui-même :
Avec la micromécanique, je guette les tout premiers signes d’endommagement des matériaux. »
Son credo : mieux comprendre comment les matériaux réagissent aux contraintes extrêmes, notamment dans l’aéronautique et le nucléaire. Grâce à des expérimentations de très haute précision, il travaille à « réduire les dimensions des pièces afin qu’elles soient plus légères et plus vertueuses pour l’environnement ». Soutenu par un ERC Starting Grant et plusieurs projets industriels, il impose son expertise bien au-delà des frontières de la région.
Damien Texier est lauréat de la médaille de bronze CNRS en 2025. © CNRS/Mélina Le Corre
Marie-Charline Blatché : des neurones sur puce et des ponts entre disciplines
La médaille de cristal vient saluer une autre forme d’innovation : celle de l’ingénierie au service du vivant. Ingénieure d’étude au LAAS-CNRS, Marie-Charline Blatché a été à l’origine d’un projet ambitieux : intégrer un espace biologique de plus de 500 m² dans un laboratoire historiquement tourné vers la physique.
On essaye de répondre à des questions biologiques avec des outils de bio-ingénierie », explique-t-elle.
Résultat : des micro et nanosystèmes capables de suivre l’activité de neurones humains dérivés de cellules souches. Une technologie de pointe, à l’interface de la biologie et de l’électronique, qui ouvre de nouvelles perspectives pour l’étude des maladies neurodégénératives.
Marie-Charline Blatché est lauréate de la médaille de cristal CNRS en 2025. © CNRS/Mélina Le Corre
Juan Escobar Munoz : les orages modélisés au pixel près
Chef de projet au Laboratoire d’Aérologie de Toulouse, Juan Escobar Munoz est l’un des piliers du calcul intensif appliqué à la météorologie. Il est notamment en charge du code Méso-NH, logiciel de simulation atmosphérique utilisé dans le monde entier pour prédire tempêtes, orages ou encore brouillards.
Depuis plus de vingt ans, cet ingénieur formé à l’ENSEEIHT perfectionne l’architecture de ce logiciel sur les supercalculateurs les plus puissants d’Europe. L’un de ses coups d’éclat récents : l’adaptation de Méso-NH aux processeurs graphiques, divisant par huit le temps de calcul et par deux la consommation électrique. Il en est convaincu :
Le réchauffement climatique est une réalité […] Par mes travaux, je suis heureux de modestement participer à mieux les prédire et essayer d’atténuer leurs conséquences. »
Juan Escobar Munoz est lauréat de la médaille de cristal CNRS en 2025. © CNRS/Mélina Le Corre
Émilie Lerigoleur Balsemin : la science ouverte, un bien commun
Si la recherche progresse, c’est aussi grâce à celles et ceux qui s’assurent que les données soient partagées, accessibles et compréhensibles par tous. C’est précisément la mission qu’Émilie Lerigoleur Balsemin mène depuis Toulouse, au sein du laboratoire GEODE.
Référente science ouverte et ingénieure en géomatique, elle a piloté pendant cinq ans le projet SO-DRIIHM, fédérant plus de 1.000 scientifiques autour d’un objectif commun : améliorer la diffusion et l’interopérabilité des données scientifiques.
La science ouverte est avant tout une démarche collective », insiste-t-elle.
Son implication dans le Comité pour la Science Ouverte et ses actions sur le terrain font d’elle une figure de proue de cette recherche plus transparente et plus éthique.
Émilie Lerigoleur Balsemin est lauréate de la médaille de cristal CNRS en 2025. © CNRS/Mélina Le Corre
Zoom sur Toulouse, scène des concerts de la science
C’est bien à Toulouse que ces talents ont trouvé leur terrain d’expression. Tous les lauréats sont rattachés à des laboratoires d’excellence implantés dans la ville ou à proximité : le CRCT, le LAAS, le LAERO, le GEODE… autant d’unités qui illustrent la diversité des recherches menées ici.
Qu’il s’agisse de modéliser les orages, de créer des neurones artificiels ou de sonder les métaux en haute température, Toulouse s’impose comme une capitale scientifique incontournable. Et la cérémonie du 18 novembre sera l’occasion de célébrer ces réussites locales à la hauteur des ambitions nationales.
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