Une politique de contrôle toujours plus rigoureuse. La lutte contre la fraude reste l’un des piliers de l’action de la Caf de Haute-Garonne. En 2024, plus de 1,1 million de contrôles ont été réalisés, permettant de repérer 35,4 millions d’euros d’indus (des sommes versées à tort à la suite d’erreurs involontaires) et 10,3 millions d’euros de fraudes caractérisées. Ces dernières ont concerné 1.276 allocataires, soit 0,36 % des bénéficiaires du département.
Pour mener à bien cette mission, la Caf s’appuie sur un arsenal de vérifications : échanges de données avec ses partenaires, demandes de justificatifs, contrôles à domicile, en agence ou par téléphone. Mais depuis la généralisation de la dématérialisation des démarches, l’institution a dû adapter ses méthodes.
La Caf a aussi un rôle important de pédagogie, dans la mesure où chaque dossier constitue presque un cas unique », souligne Céline Fourcade, directrice financière de la Caf de Toulouse.
De gauche à droite : Eléonore PATAU (Responsable du pôle lutte contre la fraude), Jean-Charles PITEAU (Directeur de la Caf de Haute-Garonne), Céline FOURCADE (Directrice financière) et David BERLUREAU (Responsable du pôle maîtrise des risques). © Léna Saoui / L’Opinion Indépendante
Erreurs ou fraudes : distinguer pour mieux accompagner
La plupart des trop-perçus relèvent d’erreurs de bonne foi. En 2024, sur les 161.247 allocataires ayant dû rembourser un indu, seuls 1.276 cas ont été qualifiés de fraude. Pour éviter que ces situations ne se reproduisent, la Caf mise sur la prévention.
Elle accompagne proactivement les allocataires, notamment ceux qui perçoivent des prestations pour la première fois ou qui présentent plusieurs indus. En 2024, 38.349 courriels de bienvenue ont été envoyés, ainsi que 4.812 lettres de mise en garde. Ces dernières se sont révélées efficaces : les destinataires ont ensuite généré cinq fois moins d’indus que les autres.
Depuis mars 2025, un nouveau dispositif a été mis en place : la solidarité à la source. Désormais, pour le RSA et la prime d’activité, les ressources ne sont plus déclarées manuellement mais transmises directement par les employeurs ou les organismes sociaux.
Nous sommes en train de rendre plus fiables toutes les ressources. Bientôt, nous pourrons d’ailleurs obtenir les informations de la situation professionnelle via France Travail par exemple », explique Jean-Charles Piteau, directeur de la Caf de Toulouse.
En 2024, 2.532 situations ont été régularisées par des contrôleurs de la Caf en Haute-Garonne, dont 48 % ont permis de détecter l’obtention de prestations supplémentaires. © CNAF
Face aux fraudes organisées, une réponse structurée
Si les erreurs déclaratives restent fréquentes, les fraudes à enjeux inquiètent de plus en plus. En 2024, la Caf de Haute-Garonne a détecté plusieurs cas de fraudes complexes et organisées, parfois en bande, et opérant à l’échelle interrégionale. Ces fraudes reposent sur des faux documents, des usurpations d’identité ou des déclarations falsifiées.
Parmi les cas marquants figure l’affaire dite « Petit Paul », récemment jugée à Nice.
L’identité de près de 257 allocataires avait été volée, pour un préjudice total de 179.000 euros », précise David Berlureau, responsable du pôle maîtrise des risques.
Grâce à sa réactivité, la Caf de Haute-Garonne n’a subi qu’une perte de 1.500 euros.
Globalement, le montant moyen d’une fraude détectée en 2024 s’élève à 8.097 euros. Les sanctions appliquées sont graduées : 63,5 % sont des pénalités financières, 31,2 % des avertissements, et 5,3 % aboutissent à des poursuites pénales.
Le SNLFE : fer de lance de la lutte contre la fraude
Depuis 2021, la Caf peut s’appuyer sur le Service National de Lutte contre les Fraudes à Enjeux (SNLFE), un dispositif composé de 43 experts répartis en cinq unités sur le territoire. En 2024, ce service a permis de détecter 37 % des montants totaux de fraudes, soit un levier majeur dans la stratégie nationale. Ce réseau interrégional permet de mutualiser les informations, partager les alertes et coordonner les actions judiciaires.
Savoir ce qui se passe ailleurs nous rend plus forts », affirme Jean-Charles Piteau.
Anticiper les nouvelles formes de fraude
Les évolutions technologiques, tout comme les nouvelles pratiques économiques, appellent une vigilance accrue. En 2025, deux nouvelles cibles de contrôle sont identifiées : les revenus issus des plateformes d’économie collaborative (Airbnb, Vinted…) et le portage entrepreneurial, notamment dans le secteur des VTC et de la livraison. Un contrôle test mené par le SNLFE sur Airbnb en 2024 a révélé 1,36 million d’euros d’indus sur 236 dossiers. En Haute-Garonne, 24 allocataires n’avaient pas déclaré 153.625 euros perçus via la plateforme.
La fraude a une ampleur de plus en plus grande. Si ces réseaux se réinventent, il faut que nous aussi nous assurions dans cette course », prévient le directeur de la Caf.
Un enjeu national pour l’équité sociale
À l’échelle nationale, la fraude détectée par les Caf en 2024 s’élève à 449 millions d’euros, en hausse de 20 % par rapport à 2023. Cela représente 0,7 % des prestations versées. Si ce taux reste faible, il n’en demeure pas moins crucial pour la crédibilité du système.
En comparaison, la fraude fiscale atteignait 16,7 milliards d’euros en 2023. Mais pour les responsables de la Caf, la lutte contre la fraude sociale reste une condition indispensable pour préserver la confiance dans la protection sociale, ainsi que son intégrité.
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